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LE RAMEAU D’OR

couraient de toute leur force, et qui voyant un trou au pied de l’arbre, se jetèrent dedans la tête la première, et pensèrent étouffer le compère grillon et la commère sauterelle. Ils se rangèrent de leur mieux dans un petit coin. — Ah ! madame, dit la plus grosse souris, j’ai mal au côté d’avoir tant couru ; comment se porte votre altesse ? — J’ai arraché ma queue, répliqua la plus jeune souris ; car sans cela je tiendrais encore sur la table de ce vieux sorcier. Mais as-tu vu comme il nous a poursuivies ? Que nous sommes heureuses d’être sauvées de son palais infernal ! — Je crains un peu les chats et les ratières, ma princesse, continua la grosse souris, et je fais des vœux ardents pour arriver bientôt au Rameau d’Or. — Tu en sais donc le chemin, dit l’altesse sourissonne ? — Si je le sais, madame ? comme celui de ma maison, répliqua l’autre. Ce Rameau est merveilleux ; une seule de ses feuilles suffit pour être toujours riche ; elle fournit de l’argent, elle désenchante, elle rend belle, elle conserve la jeunesse ; il faut, avant le jour, nous mettre en campagne. — Nous aurons l’honneur de vous accompagner, un honnête grillon que voici et moi, si vous le trouvez bon, mesdames, dit la sauterelle ; car nous sommes, aussi bien que vous, pèlerins du Rameau d’Or. Il y eut alors beaucoup de compliments faits de part et d’autre ; les souris étaient les princesses que ce méchant enchanteur avait liées sur la table ; et pour le grillon et la sauterelle, ils avaient une politesse qui ne se démentait jamais.

Chacun d’eux s’éveilla très matin ; ils partirent de compagnie fort silencieusement, car ils craignaient que des