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Comment donc l’Apôtre nous dit-il que l’homme est l’image de Dieu et doit, pour cela, ne point voiler sa tête, et que la femme ne l’est pas et doit, pour cela, voiler la sienne ? Peut-être, comme je le pense et comme je l’ai déjà dit en parlant de la nature de l’âme humaine, la femme avec son mari est-elle l’image de Dieu en ce sens que la substance humaine tout entière,n’est qu’une seule image de Dieu, mais que quand la femme est considérée comme aide — qualification qui n’appartient qu’à elle — elle cesse d’être image de Dieu ; tandis que le mari, nième pris isolément est l’image de Dieu, aussi pleine, aussi entière, que quand la femme ne fait qu’un avec lui, C’est l’explication que nous avons donnée sur la nature de l’âme humaine. Nous avons dit que quand elle est tout entière appliquée à la contemplation de la vérité, elle est l’image de Dieu ; mais que, lorsqu’une partie d’elle-même est comme déléguée et détachée par la volonté pour agir dans le monde matériel, elle n’en reste pas moins l’image de Dieu dans la partie qui se porte vers la vérité entrevue, tandis qu’elle cesse de l’être dans la partie chargée de traiter des choses inférieures. Et comme à mesure qu’elle s’étend vers les choses éternelles, elle reproduit plus fidèlement l’image de Dieu, et que de ce côté, on ne doit ni la contenir, ni modérer son élan, voilà pourquoi l’homme ne doit point voiler sa tête. Mais comme dans l’action raisonnable qui s’exerce sur les choses matérielles et temporelles, il y a un très-grand danger de descendre trop bas, l’homme doit avoir l’empire sur sa tête, et c’est ce qu’indique l’ordre de la voiler afin de la contenir et de la sauvegarder. Interprétation pieuse et sacrée qui est agréable aux saints anges. Car Dieu ne voit pas selon la mesure du temps ; il n’y a rien de nouveau pour ses yeux et pour sa science, dans les événements temporels et passagers, comme cela arrive pour les sens, charnels chez les hommes et les animaux, célestes chez les anges. 11. La preuve que l’apôtre Paul veut figurer un mystère plus profond dans la distinction du sexe masculin et féminin, c’est que, tandis qu’il dit ailleurs que la femme qui est vraiment veuve est délaissée, sans enfants ni petits enfants, et qu’elle doit cependant espérer au Seigneur et persister jour et nuit dans les prières (I Tim., V, 5 ) ; ici il indique que la femme séduite et tombée dans la prévarication sera cependant sauvée par la génération des enfants, et ajoute : « S’ils demeurent dans la foi, la charité et la sainteté jointe à la tempérance (I Tim., II, 15 ) » : comme s’il pouvait être nuisible à une veuve fidèle ou de ne pas avoir eu d’enfants, ou de ce que ceux qu’elle a eus n’ont pas voulu persévérer dans les bonnes œuvres. Mais comme les œuvres qu’on appelle bonnes, sont pour ainsi dire les enfants de notre vie, dans le sens où l’on demande quelle vie chacun mène, c’est-à-dire comment il fait ces œuvres temporelles, — ce que les Grecs appellent Bios et non plus Zoé — que ces bonnes œuvres sont principalement les œuvres de miséricorde, lesquelles sont sans profit pour les païens, pour les Juifs, qui ne croient pas au Christ, pour tous les hérétiques et les schismatiques, chez qui l’on ne trouve ni la foi, ni la charité, ni la sainteté jointe à la tempérance : cela étant, dis-je, on voit clairement la pensée de l’Apôtre ; c’est dans un sens figuré et mystique qu’il parle de voiler la tête de la femme, et ses paroles n’auraient plus de signification si elles ne se rapportaient à quelque mystère. 12. En effet, comme le déclarent, non-seulement l’infaillible raison, mais encore le témoignage de l’Apôtre, c’est selon l’âme raisonnable et non selon la forme du corps, que l’homme a été fait à l’image de Dieu. Car penser que Dieu est circonscrit et limité par une certaine conformation de membres, c’est une opinion misérable et sans fondement. Or le même bienheureux Apôtre ne dit-il pas « Renouvelez-vous dans l’esprit de votre âme et revêtez-vous de l’homme nouveau qui a été créé selon Dieu (Eph., IV, 23, 24 ) » ; et ailleurs plus ouvertement : « Dépouillez le vieil homme avec ses œuvres, et revêtez le nouveau qui se renouvelle à la connaissance de Dieu selon l’image de Celui qui l’a créé (Col., III, 9, 10 ) ? » Si donc nous nous renouvelons dans l’esprit de notre âme, et si cet esprit est l’homme nouveau qui se renouvelle à la connaissance de Dieu selon l’image de Celui qui l’a créé : on ne peut douter que l’homme ait été fait à l’image de Celui qui l’a créé, non selon le corps, ni selon une partie quelconque de son âme, mais selon l’âme raisonnable, où peut seulement exister la connaissance de Dieu. Or, selon ce renouvellement, nous devenons aussi enfants de Dieu par le baptême du Christ, et, en nous