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suivre et qu’ils auront à souffrir dans le monde après son ascension, ils le laissent seul ; mais il veut qu’ils demeurent en lui et qu’ils y trouvent la paix. Lorsque, en effet, il eut été pris par les Juifs, non seulement ils abandonnèrent corporellement son humanité, mais leur âme elle-même abandonna la foi en lui. C’est à cela que se rapportent ces paroles : « Maintenant vous croyez ? Voici venir l’heure où vous serez dispersés chacun de votre côté et où vous me laisserez ». C’était, en d’autres termes, leur dire : Alors vous serez tellement troublés, que vous laisserez même ce que vous croyez maintenant. Ils en vinrent en effet à un désespoir inouï, et pour ainsi dire à une sorte d’anéantissement de leur foi première. Cléophas en fut une preuve vivante ; car, s’entretenant avec Jésus sans le connaître après la résurrection, et lui racontant ce qui lui était arrivé, il lui disait : « Nous espérions qu’il rachèterait Israël[1] ». Voilà comment ils l’avaient laissé : ils avaient abandonné même la foi qu’ils avaient eue en lui. Mais dans la persécution qu’ils souffrirent après sa glorification et après la descente du Saint-Esprit, ils ne l’abandonnèrent plus : sans doute, ils s’enfuirent de ville en ville, mais ils ne s’éloignèrent plus de lui ; mais, afin de trouver la paix en lui-même au milieu de la persécution, ils ne s’éloignèrent pas de lui comme des transfuges ; ils le prirent, au contraire, pour leur refuge. Quand ils eurent reçu le Saint-Esprit, alors s’accomplit en eux ce qu’il leur dit maintenant. « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde ». Ils ont eu confiance et ils ont vaincu. En qui ? En lui, évidemment. Car lui n’aurait pas vaincu le monde, si ses membres s’étaient laissé vaincre parle monde. Aussi l’Apôtre dit-il : « Rendons grâces à Dieu, qui nous donne la victoire », et ajoute-t-il aussitôt : « Par Notre-Seigneur Jésus-Christ[2] ». Car le Sauveur avait dit à ses disciples : « Ayez confiance, j’ai vaincu le monde ».

CENT QUATRIÈME TRAITÉ.

SUR LES PAROLES SUIVANTES : « JÉSUS PARLA AINSI, ET AYANT LEVÉ LES YEUX AU CIEL IL DIT : « PÈRE, L’HEURE EST VENUE, GLORIFIEZ VOTRE FILS, AFIN QUE LE FILS VOUS GLORIFIE ». (Chap. 17, 1.)

LES SOUFFRANCES, SOURCE DE GLOIRE.

Tout ce que Jésus avait dit, fait et disposé à l’égard de ses Apôtres, n’avait pour but que de leur faire trouver la paix en lui, même au milieu de leurs épreuves. Pour terminer, il s’adresse à son Père, et il lui demande, puisque l’heure fixée par lui pour ses souffrances est venue, de donner à son humanité la gloire qu’elles lui mériteront.

1. Avant ces paroles, qu’avec l’aide de Dieu nous allons expliquer, Jésus avait dit : « Je vous ai dit ces choses, afin que vous ayez la paix en moi ». Ceci a trait non seulement à ce qu’il venait de leur dire à l’instant, mais encore à tout ce qu’il leur avait dit, soit depuis le moment où il les avait choisis pour ses disciples, soit au moins depuis le moment où, après la cène, il avait commencé ce long et admirable discours. Il leur rappelle en effet la cause pour laquelle il leur a parlé il voulait leur faire rapporter à cette fin, ou bien tout ce qu’il leur avait dit jusqu’alors, ou bien, et surtout, les dernières paroles qu’il leur avait adressées avant de mourir pour eux, et depuis que le traître était sorti du saint banquet. Il leur rappela donc que la fin de tous ses discours, c’était qu’ils eussent la paix en lui ; c’est à elle que se rapportent toutes les circonstances de notre vie de chrétiens. Cette paix n’aura point de fin ; mais elle doit être la fin de toutes nos pieuses intentions et de toutes nos actions. C’est pour elle que nous sommes munis des sacrements :

  1. Luc. 24, 21
  2. 1Co. 15, 57