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car alors nous aimons la loi de Dieu, et pour de telles gens il n’y a point de scandale possible.
2. Il leur annonce ensuite ce qu’ils doivent souffrir, et il leur dit : « Ils vous mettront hors des synagogues ». Quel malheur pour les Apôtres d’être chassés des synagogues juives, puisqu’ils s’en seraient eux-mêmes séparés, quand même personne ne les en eût chassés ? Le Seigneur voulait par là leur annoncer que les Juifs ne recevraient pas Jésus-Christ, dont ils ne devaient pas eux-mêmes se séparer ; ils devaient donc s’attendre à être chassés avec lui par ceux qui ne voulaient pas rester en lui, quoiqu’ils ne pussent rester sans lui. Comme il n’y avait point d’autre peuple de Dieu que cette postérité d’Abraham, s’ils avaient reconnu et reçu Jésus-Christ, ils auraient été entés sur lui comme des branches naturelles sont entées sur l’olivier franc [1], et nous n’aurions pas vu, d’un côté les Églises du Christ, et de l’autre les synagogues des Juifs ; elles eussent été confondues ensemble, si elles avaient voulu se réunir en lui. Mais puisqu’elles ne l’ont pas voulu, que restait-il à attendre ? C’est que ceux qui demeuraient séparés de Jésus-Christ mettraient hors des synagogues ceux qui ne voulaient pas l’abandonner. Après avoir reçu le Saint-Esprit, les Apôtres rendirent donc témoignage à Jésus-Christ, et ainsi furent-ils bien éloignés de ressembler à ceux dont il est dit : « Plusieurs princes des Juifs crurent en lui ; mais par crainte des Juifs, ils n’osaient pas le confesser, de peur d’être chassés des synagogues ; « car ils aimèrent la gloire des hommes plus que la gloire de Dieu[2] ». Ils crurent donc en lui, mais non pas comme l’entend Celui qui a dit : « Comment pouvez-vous croire, vous qui cherchez la gloire les uns des autres, et ne cherchez pas la gloire qui vient de Dieu seul [3] ? » Les disciples crurent donc en lui, remplis de l’Esprit-Saint, c’est-à-dire du don de la grâce de Dieu ; ils ne furent ni du nombre de ceux a qui, ignorant la justice a de Dieu, et voulant établir leur propre justice, ne sont pas soumis à celle de Dieu [4] » ; ni du nombre de ceux dont il est dit : « Ils « ont mieux aimé la gloire des hommes que « celle de Dieu ». C’est à eux que s’applique cette prophétie, puisqu’en eux elle se trouve accomplie : « Seigneur, ils marcheront dans la lumière de votre visage ; ils se réjouiront tout le jour en votre nom et ils seront a élevés dans votre justice, parce que c’est vous qui êtes la gloire de leur vertu [5] ». C’est donc avec raison qu’il leur dit : « Ils vous mettront hors des synagogues, ceux qui ont dit zèle pour Dieu, mais dont le zèle n’est pas selon la science » ; c’est pourquoi, « ignorant la justice de Dieu et voulant établir leur propre justice[6], ils chassent ceux qui s’enorgueillissent non de leur propre justice, mais de la justice de Dieu et qui, chassés par les hommes, n’en rougissent nullement, parce que c’est Dieu lui-même qui est la gloire de leur vertu.
3. Enfin, ayant ainsi parlé, Jésus ajoute « Mais l’heure vient où quiconque vous fera mourir croira être agréable à Dieu : et ils vous feront ces choses, parce qu’ils n’ont connu ni mon Père, ni moi » ; c’est-à-dire, ils n’ont connu ni Dieu, ni son Fils, auquel ils croient se rendre agréables en vous mettant à mort. Le Seigneur ajoute ceci, pour consoler ses disciples de ce que les Juifs les chasseront de leurs synagogues. D’avance il leur annonce les maux qu’ils souffriront pour lui rendre témoignage : « Ils vous mettront hors des synagogues ». Et il ne dit pas : Et l’heure vient où quiconque vous tue croira obéir à Dieu ; que dit-il donc ? « Mais l’heure vient » : comme si par ces paroles il voulait leur annoncer une compensation à tous ces maux. Que signifient donc ces mots : « Ils vous mettront hors des synagogues ; mais l’heure vient ? » C’est comme s’il voulait leur dire : Ils vous disperseront, mais je vous réunirai ; ou bien : Ils vous disperseront, mais voici venir l’heure de votre joie. Et cependant, que veut dire cette parole : « Mais a l’heure vient n, qui semble leur promettre des consolations à la suite de leurs tribulations ? Ne semble-t-il pas qu’il eût dû employer cette expression démonstrative : Et l’heure vient ? Pourtant il ne dit pas : Et l’heure vient, quoiqu’en réalité il leur annonce tribulations sur tribulations, au lieu de leur prédire une consolation à titre de récompense pour leurs peines. Cette expulsion hors des synagogues devait-elle les troubler au point d’aimer mieux mourir que de vivre séparés de l’assemblée des Juifs ? Ah 1 qu’ils étaient loin de se laisser ainsi troubler,

  1. Rom. 11, 17
  2. Rom. 5, 5
  3. Id. 5, 41
  4. Rom. 10, 3
  5. Ps. 88, 16-18
  6. Rom. 10, 2, 3