attaqué les premiers, accusé les premiers ; appelé les derniers, et les derniers encore murmuré. Et toutefois, est-ce donc l’Évangile qui nous a condamnés, disent-ils ? Vous êtes condamnés au tribunal que vous avez choisi.
9. Mais nous ne récusons point le jugement de l’Évangile. Et quand notre adversaire ne le dirait point, nous lirions l’Évangile pour en tirer des citations, des preuves. Qu’on lise l’Évangile. Mais voyons où est l’Église, d’après Notre-Seigneur Jésus-Christ. Car assurément c’est à lui qu’il faut ouvrir et nos oreilles et nos cœurs. Écoutons-le. Qu’il nous dise où est l’Église. S’il nous dit que son Église est en Afrique, nous nous rangeons tous au parti de Donat. Mais s’il dit que l’Église est répandue dans l’univers entier, c’est aux membres retranchés à revenir à l’unité. Car ces rameaux ne sont point coupés de manière qu’une nouvelle insertion soit impossible. Nous avons l’apôtre saint Paul qui nous le dit : « Ces rameaux », diras-tu, « ont été brisés pour que je fusse inséré. Il est vrai. Mais ils ont été rompus à cause de leur incrédulité, et toi, c’est par la foi que tu es debout. Garde-toi de t’élever, mais crains. Car si Dieu n’a pas épargné les branches naturelles, il pourra bien ne te pas épargner[1] ». Ainsi donc les Juifs, qui étaient comme les branches naturelles, ont été brisés, et les gentils ont été insérés comme l’olivier sauvage sur l’olivier franc. Par ces rameaux insérés, par cet olivier sauvage ainsi enté, nous avons tous notre part à l’olivier. Mais selon cette menace que faisait l’Apôtre aux rameaux orgueilleux de l’olivier sauvage, nos adversaires sont devenus tels par leur orgueil, qu’ils ont mérité à cause de cet orgueil, d’être brisés à leur tour avec les rameaux naturels déjà retranchés. Or, que dit l’Apôtre ? « Pour eux », dit-il, « s’ils ne demeurent point dans leur incrédulité, ils seront insérés à leur tour[2] », de même que tu seras retranché, si tu ne demeures pas dans la foi. Que nul donc ne s’enorgueillisse dans la vigne, que nul ne désespère, en dehors de la vigne. En t’enorgueillissant dans la vigne, crains d’en être retranché. Que ceux qui sont en dehors de la vigne se prémunissent contre le désespoir, qu’ils osent espérer l’insertion. Cette insertion n’est pas l’œuvre de la main, puisque l’Apôtre, dit : « Dieu est assez puissant pour les enter de nouveau[3] ». Qu’ils ne disent point : Comment insérer de nouveau un rameau retranché, brisé ? Cela est impossible, sans doute, si l’on s’en tient aux forces de l’humanité ; mais non si l’on fait appel à la Majesté divine. Quoi donc ? Ce qui a été fait par le Seigneur, tout vigneron pourrait le faire ? Il prend un olivier sauvage, et il y insère l’olivier franc, et le sauvageon inséré sur l’olivier donne l’olive, et non des baies amères ? Qu’un homme le fasse aujourd’hui, qu’il ente le sauvageon sur l’olivier, et il verra qu’il n’en sortira que des baies sauvages. Dieu donc a la puissance d’enter, non l’olivier sur le sauvageon, mais bien le sauvageon sur le franc, de faire couler dans le sauvageon la succulence de l’olivier franc, de manière qu’il n’ait plus aucune amertume, mais une saveur agréable, et il ne pourrait t’insérer par l’humilité, toi qui es retranché à cause de ton orgueil ? C’est bien, dira notre homme, vous m’exhortez, mais il faut d’abord me montrer que je suis retranché, de peur que vous n’ayez à vous prêcher vous-même, afin de venir à moi, et non moi à me faire enter sur vous-même. J’ose bien dire : Écoute-moi, et néanmoins cet écoute-moi, je crains de le dire, je crains qu’il ne méprise l’homme en moi ; eh bien1 soit, qu’il méprise l’homme. Car s’il méprisait l’homme, il ne suivrait point le parti de Donat. Donat aussi était homme. Si donc nous parlons de nous-mêmes, qu’il nous méprise mais si nous parlons avec le Christ, qu’il entende celui qu’on n’entend point en vain, qu’on ne méprise point en vain. L’écouter, en effet, c’est mériter une récompense ; ne l’écouter point, c’est mériter le supplice. Écoutons-le donc, donnons la parole au Seigneur.
10. Il nous parle de l’Église en plusieurs endroits ; et pourtant j’en citerai un. Après sa résurrection, vous le savez, mes frères, il se montra à ses disciples, étala devant eux ses plaies, qu’il leur fit toucher et non-seulement voir. Eux, néanmoins, qui le voyaient, le touchaient, le reconnaissaient, hésitaient encore dans leur joie, comme nous l’apprend l’Évangile, qu’il nous faut croire, qu’il est criminel de révoquer en doute. Comme donc ils hésitaient dans leur joie, comme ils doutaient encore, le Sauveur les raffermit par les saintes Écritures, et leur dit. « Voilà ce que je vous disais quand j’étais avec vous : c’est qu’il faut que s’accomplisse tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi, dans les Prophètes