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car je ne suis pas encore monté à mon Père[1] ».« Prenez garde de me toucher », car vous ne méritez pas de me toucher, vous qui me cherchez dans le sépulcre. « Abstenez-vous de me toucher », moi en qui vous ne voyez que l’humanité, et dont vous ne croyez pas encore la résurrection. « Abstenez-vous de me toucher » ; car « je ne suis pas encore monté à mon Père pour vous ». Lorsque pour vous je serai monté à mon Père, alors vous mériterez de me toucher.




VINGT-CINQUIÈME SERMON.

SUR LA FÊTE DE PÂQUES.

(CINQUIÈME SERMON.)



ANALYSE. — 1. La foi de Marie-Madeleine comparée à celle de saint Pierre. — 2. Marie-Madeleine comparée à l’Église. — 3. La foi de Marie-Madeleine comparée à celle des Apôtres. — 4. La foi de Marie-Madeleine récompensée par l’apparition de Jésus-Christ.

1. « Le lendemain du sabbat », dit l’évangéliste, « lorsque les ténèbres couvraient encore la terre, Marie-Madeleine vint au tombeau, s’aperçut que la pierre avait été enlevée du sépulcre et courut raconter ces événements à Simon Pierre et à l’autre disciple que Jésus aimait[2] ». Voyez, mes frères, voyez avec quelle ardeur cette femme se rend au tombeau du Sauveur. Elle ne considère ni l’heure ni le temps, mais elle veut contempler le Créateur de toutes choses. Simple femme, elle court avant les hommes et les prévient. O bienheureux Pierre, qu’est devenue la promesse que vous faisiez au Seigneur : « Dussé-je mourir avec vous, je ne vous renierai pas[3] ? » Si vous ne pouviez mourir pour le Seigneur, du moins, puisque vous aviez tant présumé de vous-même, vous deviez vous rendre au tombeau avant tout autre ; vous n’avez pu accomplir la promesse que vous aviez faite ; car il a suffi d’une servante pour vous conduire à l’apostasie, et voici que Marie-Madeleine arrive encore avant vous au tombeau. Veuillez, bienheureux Pierre, me pardonner l’amertume de mes paroles. Quand vous croyiez d’une foi complète, vous marchiez sur les eaux ; mais aussitôt que vous avez conçu du doute, vous avez senti la mer fuir sous vos pas. En ce moment, du moins, levez-vous ; car une femme vous a déjà précédé au tombeau.

2. Mes frères, en lisant attentivement les saintes Écritures, vous avez appris à connaître cette femme du nom de Marie-Madeleine. Comme quelques-uns pourraient encore être dans l’ignorance sur ce point, rappelons que Madeleine est cette femme que le Seigneur a délivrée de sept démons, et à laquelle beaucoup de péchés furent pardonnés, parce qu’elle avait beaucoup aimé. Que l’Église coure donc, qu’elle coure à la Pierre. « Or, la Pierre était le Christ[4] ». Ne craignez pas de comparer à l’Église Marie-Madeleine, qui, délivrée des esprits immondes, doit s’empresser la première d’accourir au tombeau du Seigneur.

3. « Elle s’adressa donc à Pierre et à l’autre disciple que Jésus aimait, et leur raconta les faits en ces termes : Ils ont enlevé le Seigneur du tombeau, et nous ne savons où ils l’ont placé. Les Apôtres accoururent et, étant entrés dans le tombeau, ils virent les linceuls qui y avaient été laissés ». Mais ils ne purent voir les anges, parce que les ténèbres de la crainte refoulaient encore dans ces Apôtres la lumière de la foi. Ils regardèrent et retournèrent à Jérusalem ; quant à Madeleine, elle ne retourna pas, mais elle se tenait

  1. Id. 17
  2. Jn. 20, 1-2
  3. Mat. 26, 3
  4. 1Co. 10, 4