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ne serait pas son Sauveur, s’il faisait ce qui empêcherait le salut de son serviteur. C’est pourquoi il vaut bien mieux qu’il ne fasse pas la chose pour laquelle on l’invoque, et qu’il fasse celle à cause de laquelle il mérite son nom. Aussi Jésus, qui est non seulement un Sauveur, mais encore un bon maître, veut pouvoir faire tout ce que nous demanderons, et, pour cela, dans la prière qu’il nous a enseignée, il nous a appris ce que nous devons demander, afin de nous faire comprendre que nous ne demandons pas au nom du maître, quand ce que nous demandons est au-delà de la règle qu’il nous a laissée.
4. Sans doute, il ne fait pas toujours sur l’heure tout ce que nous demandons en son nom, c’est-à-dire en tant qu’il est notre Sauveur et notre maître, mais cependant il le fait. En effet, même quand nous lui demandons que le règne de Dieu arrive, on ne peut pas dire qu’il ne fait pas ce que nous demandons, parce que tout aussitôt nous ne régnons pas avec lui dans l’éternité. Ce que nous demandons est différé, mais n’est pas refusé. Toutefois, quand nous prions, ne nous lassons pas plus que ceux qui sèment : au temps convenable nous moissonnerons [1]. Et en même temps que nous demandons comme il faut, demandons-lui qu’il ne fasse pas ce que nous ne demandons pas comme il faut ; c’est à cela que se rapporte ce que nous lui disons dans l’oraison dominicale : « Ne nous induisez point en tentation [2] ». Car ce n’est point une petite tentation, que de demander ce qui est contre toi. Mais il ne faut pas manquer de faire attention à ce que Notre-Seigneur ajoute, pour nous empêcher de penser que ce qu’il promet de faire à ceux qui le prieront, il doit le faire sans le Père. Après avoir dit : « Tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai », il ajoute aussitôt : « Afin que le Père soit glorifié dans le Fils, si vous demandez quelque chose en mon nom, je le fais ». Ce que fait le Fils, il ne le fait donc pas sans le Père, puisqu’il le fait, afin que le Père soit glorifié en lui. Le Père fait donc ces choses dans le Fils, afin que le Fils soit glorifié dans le Père, et le Fils les fait dans le Père, afin que le Père soit glorifié dans le Fils : car le Père et le Fils sont un.

SOIXANTE-QUATORZIÈME TRAITÉ.

DEPUIS CES PAROLES : « SI NOUS M’AIMEZ GARDEZ MES COMMANDEMENTS », JUSQU’À CES AUTRES « IL DEMEURERA CHEZ VOUS ET IL SERA EN VOUS ». (Chap. 14,15-17.)

LE DON DE L’ESPRIT-SAINT.

Pour accomplir le moindre devoir, il faut l’assistance du Saint-Esprit ; mais pour le posséder parfaitement, d’une manière permanente et intime, pour le bien connaître, il est indispensable d’observer les commandements de Jésus-Christ. Nous recevons donc le Saint-Esprit dans une mesure proportionnée à notre fidélité à ses ordres.


1. Nous l’avons entendu, mes frères, dans cette leçon de l’Évangile. Notre-Seigneur nous a dit : « Si vous m’aimez, gardez mes commandements, et je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur, pour qu’il a demeure éternellement avec vous, l’Esprit de vérité, que le monde ne peut recevoir, parce qu’il ne le voit point et ne le connaît point. Mais vous le connaîtrez, parce qu’il demeurera avec vous et qu’il sera en vous ». Il y a beaucoup de questions à faire sur ce peu de paroles de Notre-Seigneur ; mais c’est pour nous une grande entreprise de chercher à découvrir tout ce qui s’y trouve renfermé, et encore plus de trouver tout ce que nous y chercherons. Cependant, autant que le Seigneur voudra bien nous en faire la grâce, selon notre capacité et aussi selon la vôtre,

  1. Gal. 6, 9
  2. Mt. 6, 9-13