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comme Dieu est dans son temple, et nous sommes en eux comme la créature dans son Créateur.
2. Ensuite, après avoir dit : « Qu’eux aussi ils soient en nous », il ajoute : « Afin que le monde croie que vous m’avez envoyé ». Qu’est-ce à dire ? Le monde ne croira-t-il que quand nous serons tous un dans le Père et le Fils ? N’est-ce pas en cela que consiste cette paix perpétuelle qui est plutôt la récompense de la foi que la foi elle-même ? Car nous serons un, non pour croire, mais parce que nous aurons cru. Et même dans le cours de cette vie, quoique, en raison de notre foi commune, nous tous qui croyons en une même chose nous soyons un, selon cette parole de l’Apôtre : « Car vous tous vous êtes un en Jésus-Christ [1] », nous sommes un non pour croire, mais parce que nous croyons. Que signifient donc ces mots : « Que tous a soient un, afin que tout le monde croie ? » Car, « tous », c’est le monde qui croit. Autres, en effet, ne sont pas ceux qui seront un, et autre le monde qui croira, parce qu’ils seront un. Évidemment ceux dont il dit : « Que tous soient un », sont les mêmes que ceux dont il a dit : « Je ne prie pas seulement pour ceux-ci, mais encore pour ceux qui, par leur parole, croiront en moi » ; et il ajoute aussitôt : « Je prie afin que tous soient un ». Mais ces « tous », qui sont-ils ? Le monde ; non pas le monde ennemi, mais le monde fidèle. Car, après avoir dit : « Je ne prie pas pour le monde [2] », il prie afin que le monde croie. C’est qu’il y a un monde dont il est écrit : « Ne soyons pas damnés avec ce monde [3] ». Pour ce monde-là, Notre-Seigneur ne prie pas ; car il n’ignore pas à quoi il est prédestiné. Mais il y a aussi un autre monde dont il est écrit : « Car le Fils de l’homme n’est pas venu pour juger le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui [4] ». L’Apôtre conclut de là : « Dieu était en Jésus-Christ, se réconciliant le monde à lui-même [5] ». C’est pour ce monde qu’il prie, quand il dit : « Afin que le monde croie que vous m’avez envoyé ». Lorsque le monde croit au Christ qui a été envoyé de Dieu, cette foi le réconcilie à Dieu. Comment donc comprendrons-nous ces paroles : « Qu’eux aussi croient en nous, afin que le monde croie que vous m’avez envoyé ? » Notre-Seigneur n’a pas voulu dire que la cause pour laquelle le monde devait croire en lui, serait leur union, comme si le monde devait croire parce qu’il les verrait unis. En effet, le monde se compose de tous ceux qui, par leur foi, deviennent un. Mais c’est par forme de prière qu’il dit : « Que le monde croie » ; comme c’est par forme de prière qu’il a dit : « Que tous soient un » ; comme c’est par forme de prière qu’il a dit : « Qu’eux aussi soient un en nous ». En effet, ces paroles : « Que tous soient un », sont la même chose que celles-ci : « Que le monde croie », parce que c’est en croyant qu’ils deviennent un d’une manière parfaite ; car, bien qu’ils fussent un par leur nature, ils avaient eux-mêmes cessé d’être un en s’éloignant de celui qui est un. Par conséquent, si nous entendons, au troisième membre de cette phrase, cette parole de Notre-Seigneur : « Je prie », ou plutôt, ce qui sera plus complet, si nous la plaçons partout, l’explication la plus claire sera celle-ci : « Je prie pour que tous soient un, comme vous, mon Père, êtes en moi et moi en vous ; je prie pour qu’eux aussi soient un en nous ; je prie pour que le monde croie que vous m’avez envoyé ». Notre-Seigneur ajoute ces mots : « En nous », afin que si nous devenons un par l’effet d’une charité fidèle, nous sachions qu’il faut l’attribuer à la grâce de Dieu et non à nous-même s. C’est ainsi qu’après ces paroles : « Vous avez a été autrefois ténèbres, et maintenant vous êtes lumière », l’Apôtre ajoute : « Dans le Seigneur [6] », afin qu’ils n’attribuent pas ce résultat à eux-mêmes.
3. Notre Sauveur, en priant son Père, montrait qu’il était homme ; et maintenant il montre qu’il fait lui-même ce qu’il demande, parce qu’il est Dieu avec le Père. « Et moi », dit-il, « je leur ai donné la gloire que vous m’avez donnée ». Quelle gloire, sinon l’immortalité que la nature humaine devait recevoir en lui ? À la vérité, il n’avait pas encore lui-même reçu cette immortalité ; mais selon sa coutume, à cause de l’immutabilité de la prédestination, il annonce, par des verbes employés au temps passé, ce qui doit arriver, à savoir qu’il sera glorifié, c’est-à-dire ressuscité par le Père, et qu’à la fin il doit lui-même nous ressusciter pour cette

  1. Gal. 3, 28
  2. Jn. 17, 9
  3. 1 Cor. 11, 32
  4. Jn. 3, 17
  5. 2 Cor. 5, 19
  6. Eph. 5, 8