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désirs de votre père » ; c’est pourquoi vous sévissez contre le corps, parce que vous ne pouvez agir contre l’âme. « Il était homicide dès le commencement », c’est-à-dire à l’égard du premier homme. Il est devenu homicide à partir du moment où il lui a été possible de tuer un homme ; et il a pu tuer un homme dès que l’homme a été créé. Jamais, en effet, n’aurait pu avoir lieu le meurtre d’un homme, si l’homme n’avait préalablement existé. « Il était donc homicide dès le commencement ». Comment cela ? Parce qu’il n’avait point persévéré dans la vérité ». Il s’y était donc trouvé, mais comme il ne s’y était point tenu, il était tombé. Et pourquoi « n’a-t-il point persévéré dans la vérité ? Parce que la vérité n’est pas en lui ». La vérité ne pouvait se trouver en lui comme dans le Christ, puisque le Christ est la vérité même. Si donc il avait persévéré dans la vérité, il aurait persévéré dans le Christ ; « mais il n’a pas persévéré dans la vérité, parce que la vérité n’est pas en lui ».

12. « Quand il profère le mensonge, il dit ce qui lui est propre, car il est menteur et son père ». Qu’est-ce à dire ? Vous avez entendu les paroles de l’Évangile, vous les avez écoulées avec attention. Je les reprends, afin que vous sachiez bien ce dont vous me demandez l’explication. Le Sauveur disait, au sujet du démon, ce qu’il devait en dire. « Il était homicide dès le commencement » ; c’est vrai, car il a tué le premier homme : « Et il n’a point persévéré dans la vérité », car il ne s’y est pas tenu, et il est tombé. « Quand il profère le mensonge » (il s’agit évidemment ici du démon), « il dit ce qui lui est propre, car il est menteur et son père ». Quelques-uns ont cru voir dans ces paroles que le démon a un père, et ils se sont demandé quel pouvait être ce père. Ici encore l’abominable erreur des Manichéens a trouvé le moyen de tromper les simples, car ces hérétiques ont l’habitude de dire : Il est sûr que le démon a été un ange, et il est tombé : par lui a commencé le péché ; comme. vous dites. Quel était son père ? Nous répondons : Lequel d’entre nous a jamais dit que le démon a un père ? – Le Sauveur le dit, répliquent-ils ; l’Évangile en parle, car il s’exprime ainsi au sujet. du démon : « Il était homicide dès le commencement, et il n’a point persévéré dans la vérité ; car la vérité n’est pas en lui ; quand il profère le mensonge, il dit ce qui lui est propre, car il est menteur et son père ».

13. Écoute, comprends ; je ne te renvoie pas loin ; l’explication se trouve dans les paroles mêmes de l’Évangile. Le Sauveur a dit que le démon est le père du mensonge. Qu’est-ce que cela ? Le voici, écoute-moi, répète les paroles précitées, et comprends. Quiconque profère un mensonge n’en est point, par cela même, le père. Si un homme a menti devant toi, et que tu répètes son mensonge, il est sûr que tu mens toi-même en proférant la fausseté sortie de sa bouche ; mais tu n’en es point le père, car tu n’en es point le premier auteur. Quant au démon, c’est de son propre fonds qu’il est menteur ; il a mis au monde son imposture, elle ne lui est venue d’aucun autre. De même que Dieu le Père a engendré son Fils qui est la vérité ; ainsi le démon, ange déchu, a engendré son fils, qui est le mensonge. Cela dit, reprends et répète les paroles du Sauveur âme catholique, remarque ce que tu as entendu ; fais attention à ce que dit le Christ. « Il ». Qui ? Le démon, « était homicide dès le commencement ». Nous le savons : il a fait mourir Adam. « Et il n’a point persévéré dans la vérité ». Nous reconnaissons encore qu’il ne s’y est pas tenu et qu’il est tombé. « Car la vérité n’est pas en lui ». Pas de doute à cet égard : puisqu’il s’est séparé de la vérité, il ne la possède pas. « Lorsqu’il profère le mensonge, il dit ce qui lui est propre ». Un autre ne lui transmet pas ce qu’il dit. « Lorsqu’il profère le mensonge, il dit ce qui lui est propre, car il est menteur, et son père ». Il est menteur et père du mensonge tout à la fois. Que tu profères un mensonge, tu es menteur, mais tu n’en es peut-être pas le père ; car si le démon t’a transmis une imposture, et que tu aies ajouté foi à sa parole, le mensonge est sur tes lèvres, mais tu n’en es pas le père ; pour le démon, il n’a reçu de personne cette imposture, dont il s’est servi comme le serpent se sert de son venin, pour tuer l’homme : il est le père du mensonge, de la même manière que Dieu est le Père de la vérité. Écartez-vous du père du mensonge ; courez au Père de la vérité, embrassez-la, afin de recevoir le bienfait de la liberté.

14. Les Juifs ont donc vu en leur père ce qu’ils disaient ; qu’y ont-ils vu, sinon le mensonge ?