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VINGT-ET-UNIÈME TRAITÉ.

DEPUIS CES PAROLES : « CAR LE PÈRE AIME LE FILS ET LUI MONTRE TOUT CE QU’IL FAIT », JUSQU’À CES AUTRES « CELUI QUI N’HONORE PAS LE FILS, N’HONORE PAS LE PÈRE QUI L’A ENVOYÉ ». (Chap. 5,20-23.)

LES ŒUVRES DU CHRIST.

« Le Fils ne fait que ce qu’il a vu faire à son Père, et le Père lui montre tout ce qu’il fait », c’est-à-dire, le Père est l’archétype de toutes les créatures ; il les voit en lui-même, et cette vision et la science qui en résulte, ne sont autre chose que son Verbe : de là il suit que, pour le Verbe, voir, apprendre, connaître, c’est être. Quant au Christ considéré comme homme et comme représentant de tous les membres de l’Église, Dieu doit lui montrer à opérer des merveilles plus admirables que la guérison d’un paralytique. Comme Dieu, il ressuscitera les morts à la fin du monde. Comme homme, il les jugera, afin que tous l’honorent de la même manière qu’ils honorent le Père.


1. Autant que Dieu nous en a fait la grâce, et selon qu’il nous a été possible de le comprendre et de le dire, nous vous avons expliqué, dans l’instruction d’hier, comment il peut se faire que les œuvres du Père et du Fils soient inséparables : comment les œuvres du Père, au lieu d’être différentes de celles de Fils, sont exactement les mêmes, en ce sens que le Père les fait par son Fils, comme par son Verbe. N’est-il pas écrit, en effet : « Toutes choses ont été faites par lui, et, sans lui rien n’a été fait ? » Aujourd’hui, nous avons à examiner les passages qui suivent prions le Seigneur de nous accorder sa bénédiction, espérons-la de sa part ; peut-être nous jugera-t-il dignes de comprendre la vérité contenue dans ses paroles ; et si nous nous trouvons incapables de la saisir, peut être sa grâce nous empêchera-t-elle de tomber dans l’erreur. Car mieux vaut ignorer que se tromper ; mais la science est bien préférable à l’ignorance : aussi devons-nous, avant tout, nous efforcer de savoir. Si nous le pouvons, Dieu en soit loué ; mais s’il nous est impossible de parvenir jusqu’à la vérité, ne nous jetons pas dans l’erreur. Qui sommes-nous ? Que cherchons-nous à comprendre ? ce qu’il nous faut examiner. Nous sommes des hommes revêtus d’un corps, nous sommes des pèlerins ici-bas ; la parole de Dieu nous a, sans doute, communiqué le germe d’une nouvelle vie ; mais, bien que renouvelés dans le Christ, nous ne sommes pas encore entièrement dépouillés du vieil Adam. En nous, le corps qui se corrompt appesantit l’âme [1] ; il nous vient d’Adam, c’est chose manifeste, et personne ne saurait en douter. Mais le principe spirituel qui rend notre âme supérieure au monde est un don de ce Dieu miséricordieux qui a envoyé son Fils unique sur la terre, pour partager notre condition mortelle et nous faire entrer en possession de son immortalité. Il est notre maître et doit nous apprendre à ne point pécher : il sera notre défenseur, si, après avoir péché, nous confessons nos fautes et revenons au bien ; il sera notre avocat au moment où nous demanderons à Dieu quelque bienfait, et, conjointement avec le Père, il nous accordera l’objet de nos désirs ; car le Père et le Fils ne sont qu’un seul Dieu, Les paroles qui vont nous occuper, il les adressait aux hommes en qualité d’homme ; en lui le Dieu se cachait et l’homme se montrait, pour faire des dieux avec de simples hommes ; étant Fils de Dieu, il est devenu fils de l’homme, afin de rendre enfants de Dieu les enfants des hommes. Par quelle mystérieuse invention de sa sagesse a-t-il agi ainsi ? Ses paroles mêmes nous l’apprennent. Il s’est fait petit pour parler à des petits ; mais bien que petit, il n’a pas cessé d’être grand ; et nous, si nous sommes petits par nous-mêmes, nous devenons grands par notre union avec lui : il nous parle donc comme une nourrice parle à son bien-aimé nourrisson, qu’elle aide à grandir à force de soins.
2. Il avait dit : « Le Fils ne peut rien faire par lui-même que ce qu’il voit faire à son Père [2] ».

  1. Sag. 9, 15
  2. Jn. 5, 19