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de rentrer dans les eaux du baptême.
7. Celui qui naît de l’Église catholique vient en quelque sorte de Sara ; il naît de la femme libre. Celui quai naît de l’hérésie, naît de l’esclave, quoiqu’il descende d’Abraham. Que votre charité remarque la grandeur de ce mystère. Dieu fait un serment : voici ce qu’il dit : « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». N’y a-t-il pas d’autres patriarches ? N’y a-t-il pas avant eux le saint Noé, qui seul, parmi tous les hommes, mérita avec toute sa famille d’être préservé du déluge et de devenir en sa personne et en celle de ses enfants la figure de l’Église ? Portés sur le bois, ils échappent au déluge [1]. Depuis, n’y a-t-il pas eu les grands hommes qui nous sont connus, que célèbre l’Écriture, par exemple Moïse, ce serviteur fidèle dans toute la maison de Dieu[2] ? Cependant, eux seuls sont nommés comme s’ils étaient seuls à l’avoir mérité. « Je suis le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, c’est là mon nom pour l’éternité[3] ». Grand mystère ! Dieu a tout pouvoir pour ouvrir et ma bouche et votre cœur, afin que je puisse vous l’expliquer comme il a daigné me le faire entendre, et que vous puissiez recevoir ce que je vous en dirai de la façon la plus avantageuse à votre salut.
8. Ces patriarches étaient donc au nombre de trois : Abraham, Isaac et Jacob. Vous le savez, Jacob a eu douze fils, qui sont devenus la souche du peuple d’Israël. Jacob, en effet, s’appelait Israël, et le peuple d’Israël se composait de douze tribus, et chacune d’elles se rattachait à chacun des douze fils d’Israël. Abraham, Isaac et Jacob, voilà donc trois pères, et de ces trois pères un seul peuple. Ces trois pères étaient comme ce peuple en germe, ils en étaient les représentants ; et ce peuple primitif était la figure du peuple de Dieu actuel. En effet, le peuple juif était la figure du peuple chrétien. Là était la figure, ici la réalité là était l’ombre, ici le corps ; car l’Apôtre a dit : « Or, ces choses leur arrivaient en figure ». C’est la parole de l’Apôtre. Et encore : « Ces choses », dit-il, « ont été écrites pour nous qui arrivons à la fin des temps[4] ». Ramenez maintenant votre pensée à Abraham, Isaac et Jacob. Nous voyons qu’ils out des enfants de leurs femmes libres et de leurs servantes. Nous trouvons aussi la prospérité des unes bien distincte de celle des autres. La servante n’indique rien de bon : « Chassez la servante et son fils ; car le fils de la servante ne sera pas héritier avec le fils de la femme libre ». L’Apôtre nous rappelle ce passage, et nous explique qu’en ces deux fils d’Abraham étaient figurés les deux Testaments, l’Ancien et le Nouveau. À l’Ancien Testament appartiennent les amateurs des choses temporelles, les amateurs du siècle ; au Nouveau appartiennent les amateurs de la vie éternelle. Aussi, ta Jérusalem terrestre était la figure de la Jérusalem d’en haut, notre mère qui est au ciel. Ce sont les paroles de l’Apôtre[5]. Cette cité, loin de laquelle nous vivons comme des exilés, vous la connaissez, vous en avez souvent entendu parler. Mais, chose remarquable t dans ces diverses naissances, c’est-à-dire dans ces progénitures, dans ces enfants des femmes libres et des servantes, nous trouvons quatre races d’hommes figurant d’une manière complète et d’avance, le peuple chrétien. De la sorte, il n’y a plus lieu ne s’étonner que Dieu, parlant de ces trois patriarches, ait dit : « Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob ». En effet, mes frères, remarquez bien ce qui se passe dans l’universalité du peuple chrétien des méchants engendrent des bons, ou des bons engendrent des méchants ; ou des bons ont pour pères de pareils qu’eux, ou des méchants n’ont pour enfants que des méchants ; en dehors de ces quatre hypothèses, il n’en existe pas d’autre. Je répète, faites-y attention, retenez bien : Remuez-vous ; pas de dormeurs. Pour ne pas être pris, apprenez quelles sont les quatre catégories d’origine parmi les chrétiens. Ou les bons naissent de parents bons ; ou les méchants viennent de parents bons ; ou les méchants viennent de gens mauvais ; ou les bons viennent de personnes méchantes. Rien de plus clair, ce me semble. Les bons naissent des bons, quand celui qui baptise est bon et que ceux qui sont baptisés croient comme il faut et sont légitimement comptés parmi les membres de Jésus-Christ. Les méchants naissent des méchants, lorsque celui qui baptise est mauvais, que ceux qui sont baptisés s’approchent de Dieu avec un cœur double et ne conforment pas leurs mœurs à la règle qu’on leur donne à l’Église, pour faire d’eux, non pas de la paille, mais du bon grain. Combien

  1. Gen. 7, 7
  2. Nb. 12, 7
  3. Ex. 3, 6, 15
  4. 1 Cor. 10, 11
  5. Gen. 21, 10 ; Galat. 4, 22-30