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point : il s’élèvera de faux Christs et de faux Prophètes, qui diront : C’est ici, c’est là[1] ». Ce n’est point du chef qu’ils disent : « c’est ici, c’est là » ; on sait que le Christ est dans le ciel, mais c’est de l’Église en laquelle est le Christ qui a dit : « Voilà, je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles[2] ». Or, le Seigneur a dit : « Ne les croyez point ». Dire en effet : « C’est ici, c’est là », c’est vous montrer des parties ; or, j’ai acheté le tout. Que l’Évangile me tienne encore ce langage : Dites cela vous-mêmes dans l’Évangile, vous Seigneur, qui êtes ressuscité d’entre les morts, afin qu’ils croient aussi en vous, ceux qui croient à Moïse et aux Prophètes ; dites-moi cela vous-même. Je vous écoute. « Il fallait que le Christ souffrît et ressuscitât le troisième jour, et qu’en son nom la pénitence et la rémission des péchés fussent prêchées parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem[3] ». Que vas-tu répondre, ô hérétique ? Quand je citais Moïse, quand je citais les Prophètes, tu en appelais à celui qui devait ressusciter d’entre les morts. Voilà qu’il est ressuscité, qu’il a parlé ; l’Église du Christ, l’Épouse du Christ n’est pas plus douteuse que n’est douteux le corps du Christ que voyaient, que touchaient ses disciples. Celui qui est ressuscité d’entre les morts nous a montré l’un et l’autre ; il nous a montré la tête, montré les membres, montré l’Époux et montré l’Épouse. Ou crois ces deux articles avec moi, ou n’en crois qu’un seul, mais pour ta damnation. Crois-tu, en effet, qu’il se soit levé d’entre les morts, et levé dans le même corps ? C’est bien ; puisqu’il a montré ses meurtrissures, puisqu’il s’est montré tel qu’il a été à la croix, et au sépulcre, tu as raison de croire ; écoute la parole de celui en qui tu as mis ta foi : « Il faut que la pénitence et la rémission des péchés soient prêchées en son nom ». Où prêchées ? Dans l’étendue des terres. Si je parlais ainsi moi-même, dans ma polémique, dans ma lutte contre les hérétiques, dans mes conflits sur une telle question, je ne pourrais parler contre les hérétiques d’aujourd’hui avec autant de précision que le Christ contre ceux de l’avenir. Que veux-tu de plus ? Où prêche-t-on la rémission des péchés au nom du Christ ? Où ? « Dans toutes les nations ». A Partir d’où ? « A partir de Jérusalem ». Entre dans la communion de cette Église. Pourquoi disputer encore ? C’est dans la Jérusalem de la terre que l’Église a pris naissance, afin de se réjouir en Dieu dans la Jérusalem céleste. Elle commence à l’une pour se terminer à l’autre. Elle sera tout entière dans la Jérusalem du ciel, mais c’est dans celle de la terre qu’elle a commencée à croire.
19. Vois dans les Actes des Apôtres, si je ne me trompe, comment les disciples étaient assemblés à Jérusalem, quand le Saint-Esprit descendit. Tu comprendras alors le sens de cette parole : « A partir de Jérusalem », quand tu verras ces mêmes hommes sur qui le Saint-Esprit est descendu[4] parlant toutes les langues. Pourquoi ne veux-tu point parler la langue de tous les peuples ? Voilà bien que toutes les langues se font entendre, ô Jérusalem. Pourquoi celui qui reçoit maintenant le Saint-Esprit ne parle-t-il point toutes les langues ? C’était alors le signe que le Saint-Esprit descendrait sur les hommes, et qu’ils parleraient la langue de tous. Que vas-tu répondre, ô hérétique ? Que l’on ne donne plus l’Esprit-Saint. Je ne demande pas où on le donne, mais le donne-t-on ? Si on ne le donne point, que prétendez-vous faire, en parlant, en baptisant, en bénissant ? Que faites-vous ? d’inutiles cérémonies ? Diras-tu qu’on le donne ? Alors pourquoi ceux qui le reçoivent ne parlent-ils point toutes les langues ? Le don de Dieu est-il en défaut, son fruit a-t-il diminué ? L’ivraie a poussé sans doute, mais aussi le froment. « Laissez croître l’une et l’autre jusqu’à la moisson[5] ». Le Sauveur n’a point dit : Que l’ivraie croisse, et que le froment diminue ; ils croissent l’un et l’autre. Pourquoi le Saint-Esprit ne se fait-il point voir dans le don des langues ? Que dis-je ? il se montre maintenant dans toutes les langues ; l’Église alors n’était point répandue par toute la terre, de manière que ses membres pussent parler chez tous les peuples. Dieu alors accomplissait dans un seul homme ce qui était annoncé pour tous. Aujourd’hui le corps du Christ parle toutes les langues, et il parlera celles qu’il ne parle pas encore ; car l’Église croîtra jusqu’à ce qu’elle occupe toutes les langues du monde. Quel n’est point l’accroissement de cette Église que vous avez abandonnée ! Possédez avec nous ce qu’elle possède, afin d’arriver avec nous jusqu’où

  1. Mat. 24,23-24
  2. Id. 28,20
  3. Luc. 24,13-47
  4. Act. 1,4-14 ; 2,1-12
  5. Mat. 13,30