Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/24

Cette page n’a pas encore été corrigée

que seront les fils de Dieu fidèles à sa volonté ; c’est à eux qu’il dira : « Venez, bénis de mon Père, recevez le royaume qui vous a été préparé à l’origine du monde[1] ». Tu as donc reçu le pouvoir d’être à la droite, le pouvoir de devenir enfant de Dieu. Quel pouvoir ? Celui dont saint Jean nous dit : « Il leur a donné la puissance de devenir enfants de Dieu[2] ». D’où as-tu reçu cette puissance ? « Elle est donnée à ceux qui croient en son nom ». Si donc tu as la foi, tu as aussi le pouvoir d’être enfant de Dieu. Or, être parmi les enfants de Dieu, c’est être à sa droite. Donc ta loi est la main de ta droite, c’est-à-dire que la main de ta droite c’est le pouvoir qui t’a été donné d’être parmi les enfants de Dieu. Mais que deviendrait cette puissance que l’homme a reçue, si Dieu ne le protégeait ? Le voilà qui croit, qui marche dans la foi ; il est faible, agité au milieu des tentations, des chagrins, des attraits charnels, des aiguillons de la convoitise, des artifices et des pièges de l’ennemi. De quoi lui sert de croire au Christ et d’avoir la puissance d’être parmi les enfants de Dieu ? Malheur à cet homme, si Dieu ne vient au secours de sa foi ; c’est-à-dire s’il n’empêche que tu sois tenté au-dessus de tes forces, comme l’a dit l’Apôtre : « Dieu est fidèle et il ne souffrira point que vous soyez tentés au-delà de ce que vous pouvez supporter[3] ». Celui donc qui ne souffre pas que nous soyons tentés au-dessus de nos forces, quoique nous ayons déjà la foi, quoique nous possédions la main de notre droite, Dieu nous protège sur la main de notre droite. Il ne nous suffirait pas d’avoir la main de notre droite, si lui-même ne couvrait de sa protection cette main de notre droite.
12. Voilà pour les tentations : écoutez ce qui suit : « Que le Seigneur te protège sur la main de ta droite ». Je vous l’ai expliqué, et, autant que je puis en juger, j’ai réveillé vos souvenirs. Si vous ne l’aviez déjà su, et su par les saintes Écritures, vos murmures ne m’auraient point fait connaître que vous l’avez compris. Donc, mes frères, puisque vous l’avez compris, voyez ce qui suit, pourquoi Dieu nous protège, et sur la main droite, c’est-à-dire dans cette même foi, dans laquelle nous avons reçu le pouvoir d’être enfants de Dieu et d’être à sa droite. Pourquoi faut-il que Dieu nous protège ? À cause des scandales. D’où viennent les scandales ? Il faut les craindre sous deux points de vue, parce qu’il y a deux préceptes qui renferment toute la loi et les Prophètes, l’amour de Dieu et l’amour du prochain[4]. On aime l’Église à cause du prochain, et Dieu pour lui-même or, le soleil est une figure de Dieu, comme la lune est une figure de l’Église. Quiconque peut être dans l’erreur au point de croire sur Dieu ce qu’il ne faut point croire, ou à ne point croire que le Père, le Fils et le Saint-Esprit sont une même substance, est dans l’erreur des hérétiques, principalement des Ariens. S’il croit que Je Fils ou le Saint-Esprit ont quelque chose de moins que le Père, il est tombé dans le scandale en ce qui regarde Dieu, et dès lors brûlé par le soleil. Quiconque aussi croit que l’Église est dans une partie du monde, et ne reconnaît point qu’elle est répandue dans le monde entier, qui croit à ceux qui lui disent : « C’est ici, c’est là qu’est le Christ[5] », comme vous l’avez entendu tout à l’heure dans la lecture de l’Évangile, tandis que le Christ a racheté le monde entier pour lequel il a donné une telle rançon : celui-là est scandalisé au sujet du prochain, il est brûlé par la lune. Ainsi quiconque est dans l’erreur sur la substance même de la vérité, est brûlé par le soleil, brûlé pendant le jour, parce qu’il erre au sujet de la sagesse dont il est dit : « Le jour parle au jour ». De là cette parole de l’Apôtre : « Nous communiquons les choses spirituelles à ceux qui sont spirituels. Le jour annonce la parole au jour, en communiquant les choses de l’esprit aux hommes spirituels. Le jour annonce la parole au jour ; mais nous annonçons la sagesse aux parfaits[6] ». Que signifie « et la nuit annonce la science à la nuit[7] ? » Aux petits on prêche l’humilité du Christ, l’incarnation du Christ, la croix du Christ ; c’est le lait qui suffit aux enfants. Dès lors on n’abandonne point les enfants dans la nuit, puisque la lune éclaire dans la nuit ; c’est-à-dire que par la chair du Christ on prêche l’Église, puisque la tête de l’Église c’est fe Christ eu sa chair. Quiconque n’est scandalisé ni de l’Église ni de la chair du Christ, celui-là n’est point brûlé par la lune. Quiconque n’est point scandalisé au sujet de la vérité immuable et inaltérable, n’est point brûlé par le soleil ; non point qu’il soit épargné

  1. Mt. 25,34
  2. Jn. 1,12
  3. 1 Cor. 10,13
  4. Mat. 22,37-40
  5. Id. 24,23
  6. 1Co. 2,13
  7. Ps. 18,3