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qui pointillent, qui calomnient, qui se séparent, qui « reçoivent leurs villes », non pour l’éternité, mais pour la vanité. « Éprouvez-moi donc, ô Dieu, et connaissez mon cœur ; sondez-moi, et connaissez mes sentiers ». Que veut dire le Prophète ? Écoutons la suite.
30. « Et voyez s’il y a en moi quelque trace d’iniquité ; conduisez-moi dans la voie éternelle[1] ». « Sondez mes sentiers », dit le Prophète, c’est-à-dire mes desseins et mes pensées : « Et voyez s’il y a en moi quelque trace de l’iniquité », soit que je l’aie commise, soit que j’y aie consenti : « Et conduisez-moi dans la voie éternelle » Qu’est-ce à dire, sinon conduisez-moi dans le Christ ? Qui est, en effet, la voie éternelle, sinon celui qui est aussi la vie éternelle ? Or, celui-là est éternel qui a dit : « Je suis la voie, la vérité et la vie[2] ». Si donc vous trouvez dans mes voies quelque chose qui déplaise à vos yeux, parce que ma voie est mortelle ; pour vous, « conduisez-moi dans la voie éternelle », où l’on ne voit nulle injustice : « Si quelqu’un, en effet, vient à pécher, nous avons pour avocat auprès du Père, Jésus-Christ qui est juste. C’est lui qui intercède pour nos péchés[3] » ; c’est lui qui est la voie éternelle sans aucune faute, et la vie éternelle sans châtiment.
31. Il y a là une grande figure, mes frères. De quelle manière l’Esprit parle-t-il avec nous ? Comment fait-il nos délices dans l’obscurité de cette nuit ? Pourquoi, mes frères, je vous le demande, ces vérités ont-elles plus de douceurs à proportion de leur obscurité ? Dieu, par d’ineffables secrets, nous prépare un breuvage d’amour. Il donne un tour admirable à ses paroles, en sorte que, dussions-nous dire ce que vous savez déjà, la connaissance vous en paraît nouvelle, parce qu’on le tire de passages qui vous paraissaient obscurs, Ne saviez-vous point, en effet, mes frères, qu’il nous faut tolérer les méchants dans l’Église de Dieu, sans y faire aucun schisme ? Ne saviez-vous point déjà que dans ce filet, qui contient de bons et de mauvais poissons, il faut demeurer jusqu’à ce que le filet soit amené sur le rivage, et qu’il ne faut point le déchirer ; que sur le rivage seulement on fera la séparation, afin de mettre les bons poissons dans des vaisseaux, et de jeter les mauvais ? Voilà ce que vous saviez, sans toutefois comprendre ces versets de notre psaume : je vous ai expliqué ce que vous ne compreniez pas, et vous y avez trouvé ce que vous saviez.

  1. Ps. 138,24
  2. Jn. 14,6
  3. Jn. 2,1