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« Venez, bénis de mon Père, recevez le royaume qui vous a été préparé dès l’origine du monde. Car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger », et le reste. Mais eux, « quand vous avons-nous vu avoir faim », lui diront-ils ? Et lui : « Quand vous l’avez fait au moindre des miens, c’est à moi que vous l’avez fait[1] ». Le ciel montre à la terre que ses plus petits ont été appelés en haut, et tirés de leur bassesse : « Quand vous l’avez fait au moindre des miens, c’est à moi que vous l’avez fait ». « Il appellera le ciel en haut, ainsi que la terre, pour séparer son peuple ».
12. « Rassemblez autour de lui ses justes[2] ». Telle est la voix de Dieu et du Prophète qui voyait l’avenir comme s’il eût été présent, et qui commande aux anges de rassembler les hommes. « Il enverra ses anges, et ils rassembleront devant lui toutes les nations[3]. « Rassemblez les justes autour de lui ». Quels sont ces justes, sinon ceux qui vivent de la foi, qui font des œuvres de miséricorde ? Car ces œuvres sont des œuvres de justice. Tu lis dans l’Évangile : « Prenez garde de faire votre justice en présence des hommes pour en être vus[4] ». Et comme si l’on demandait : Quelle justice ? l’Évangéliste ajoute : « Ainsi en faisant l’aumône[5] ». Donc l’aumône désigne ici les œuvres de justice. Rassemblez donc ses justes, rassemblez ceux qui ont pris en pitié le pauvre, qui ont eu l’intelligence du pauvre et de l’indigent : assemblez-les, afin que le Seigneur les conserve et les vivifie[6] : « Rassemblez-lui ses justes ; tous ceux qui contractent avec lui une alliance par le sacrifice », c’est-à-dire, qui pensent à ses prouesses dans les bonnes œuvres qu’ils font. Car ces œuvres sont des sacrifices, puisque le Seigneur a dit : « Je préfère la miséricorde au sacrifice[7] ». Ils contractent donc une alliance avec lui par le sacrifice.
13. « Les cieux annonceront sa justice[8] ». Oui, en effet, les cieux nous ont annoncé la justice de Dieu. Les évangélistes l’ont prêchée. Par eux nous avons appris que ceux-là seraient à sa droite, à qui le Père de famille dirait : « Venez, bénis de mon Père, et recevez ». Que recevrez-vous ? « le royaume ». Pourquoi ? « Parce que j’ai eu faim, et que vous m’avez donné à manger[9] », Quoi de plus vulgaire, de plus terrestre, que de donner un morceau de pain à celui qui a faim ? Voilà ce que coûte le royaume des cieux. « Partage ton pain avec celui qui a faim, et reçois sous ton toit celui qui n’a pas d’asile ; si tu vois un homme nu, couvre-le[10] » – Mais si tu n’as ni pain à partager avec lui, ni logis à lui offrir, ni habit pour le vêtir, donne-lui un verre d’eau froide[11] ; mets seulement deux deniers dans le trésor[12]. Ces deux deniers valurent à la veuve ce que valut à Pierre d’abandonner ses filets, et à Zachée de donner la moitié de son bien[13]. Ce royaume coûte ce que vous avez. « Les cieux donc annonceront sa justice, car le Seigneur est juges. Oui, vraiment juge, ne confondant rien, discernant tout. « Car le Seigneur connaît ceux qui sont à lui[14] ». Bien que les grains soient cachés dans la paille, le laboureur les connaît. Que nul ne craigne d’être le bon grain, fût-il mêlé à la paille, car les yeux de notre vanneur ne peuvent se tromper. Ne crains donc pas que la tempête qui se fera autour de lui te confonde avec la paille. La tempête sera violente à la vérité, et pourtant elle n’ôtera pas un seul grain de blé pour le jeter avec la paille ; car le juge ne sera point quelque homme agreste avec son trident, mais bien le Dieu Trinité. « Les cieux annonceront sa justice, car le Seigneur est un juge. Que les cieux aillent et qu’ils prêchent, que leur voix gagne les confins de la terre, et que leurs paroles se répandent jusqu’aux extrémités du monde[15] » ; et que ce grand corps dise à Dieu : « Des confins de la terre j’ai crié vers vous, quand mon cœur était dans l’angoisse[16] » Aujourd’hui qu’il est dans la confusion, il gémit ; après le discernement, il sera dans la joie. Qu’il élève donc la voix et qu’il dise : « Ne perdez point mon âme avec les impies, et ma vie avec les hommes de sang[17] ». Le Seigneur ne nous perdra pas avec eux, parce qu’il est un juge. Qu’il crie donc vers lui, et lui dise : « Jugez-moi, Seigneur, et séparez ma cause de celle d’un peuple impie » Qu’il parle ainsi et Dieu l’écoutera ; et tous ses justes se presseront autour de lui. « Il a appelé la terre pour séparer son peuple ».
14. « Ecoute, mon peuple, et je te parlerai[18] ».

  1. Mt. 25,34-40
  2. Ps. 49,1
  3. Mt. 25,32
  4. Id. 6,1
  5. Id. 2
  6. Ps. 40,2-3
  7. Os. 6,6 ; Mt. 9,13
  8. Ps. 49,6
  9. Mt. 25,34
  10. Isa. 58,7
  11. Mt. 10,42
  12. Mc. 12,42
  13. Lc. 19,8
  14. 2 Tim. 2,19 ; Ps. 18,5
  15. Id. 60,3
  16. Id. 25,9
  17. Id. 42,1
  18. Id. 49,7