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qui viendront l’adorer avec des présents sont donc les riches d’entre le peuple, à qui l’ami de l’Époux s’adresse ainsi : « Ordonnez aux riches de la terre de n’être point orgueilleux, de ne point mettre leur confiance dans les richesses incertaines ; mais dans le Dieu vivant, qui nous donne avec abondance ce qui est nécessaire à la vie ; de s’enrichir par de bonnes œuvres ; de donner facilement, de faire part de leurs richesses ». L’adorer avec des présents ; car ce n’est point là perdre, mais se faire un trésor que l’on peut toujours retrouver. « Qu’ils s’amassent un trésor qui soit un fondement solide pour l’avenir, afin d’embrasser la véritable vie »[1]. Adorer avec des présents, c’est donc implorer vos regards. Ils viennent en foule dans l’Église pour y faire leurs aumônes, de peur qu’ils ne soient dehors, c’est-à-dire de peur que, placés en dehors de l’Église, ils ne fassent leurs aumônes dans l’Église. Car le visage de cette Épouse, de cette reine, leur sera favorable dans leurs bonnes œuvres. C’est pourquoi ceux qui vendaient leurs terres, venaient avec des présents implorer les faveurs de cette reine, et déposaient aux pieds des Apôtres l’argent qu’ils portaient[2]. La charité était alors fervente dans l’Église, et l’Église était la face de cette reine ; la face de cette reine était la soumission des filles de Tyr, ou des riches qui adoraient avec des présents : « Les riches d’entre le peuple imploreront votre faveur ». Ceux qui implorent la faveur, et celle dont on implore la faveur, ne forment tous qu’une seule Épouse, tous une seule reine, la mère et les fils ne font qu’un même tout appartenant à Jésus-Christ, appartenant au chef.
29. Mais parce que ces aumônes et ces bonnes œuvres se font quelquefois en vue d’une gloire humaine, le Seigneur lui-même nous donne cet avertissement : « Gardez-vous de faire vos bonnes œuvres sous les yeux des hommes, afin d’en être vus »[3] ; mais il nous marque – en même temps la publicité qu’on doit donner à ces œuvres, à cause du visage de l’Épouse : « Que vos œuvres », dit-il, « brillent devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes actions et qu’ils en glorifient votre Père qui est dans les cieux »[4] ; non pas que dans ces bonnes œuvres faites en public vous dussiez chercher votre propre gloire, mais bien la gloire de Dieu. Eh ! qui sait, me dira-t-on, si c’est ma gloire ou la gloire de Dieu que je cherche ? Quand je donne au pauvre, on me voit, mais qui voit mon intention ? Qu’il te suffise du témoin qui te voit, car ce témoin est celui qui t’en donnera la récompense. Celui qui voit dans le secret aime aussi dans le secret : il aime dans le secret, qu’il soit aussi aimé au dedans, celui qui donne aussi la beauté intérieure. Ne cherche pas un vain plaisir dans les regards extérieurs, non plus qu’à être vu, à être loué, mais vois ce qui suit : « Toute la gloire de cette fille du roi vient de son cœur »[5]. Non seulement elle a au-dehors un vêtement d’or nuancé de broderies, mais celui qui s’est épris de sa beauté connaît sa beauté intérieure. Quelle est donc cette beauté intérieure ? Celle de la conscience. C’est là que voit Jésus-Christ, là que nous aime Jésus-Christ, là que nous parle Jésus-Christ, là que Jésus-Christ châtie, là que Jésus-Christ nous couronne. Que votre aumône soit donc secrète, parce que : « Toute la gloire de cette fille du roi vient de ce son cœur : elle est parée de franges d’or et couverte de broderies[6] ». Sa beauté est intérieure : « ces franges d’or » désignent la variété des langues, la beauté de la doctrine. Mais à quoi bon tout cela sans la beauté intérieure ?
30. « A sa suite les vierges seront présentées au roi »[7]. Voilà ce qui est véritablement accompli. L’Église a pris de l’accroissement, l’Église s’est répandue parmi les nations Quel vif désir maintenant, pour ces vierges, de plaire à ce roi ? Qui les presse en cela ? L’Église qui leur en a donné l’exemple. « A sa suite, les vierges seront présentées au roi : les compagnes de l’Épouse, ô roi, vous seront présentées »[8]. Celles qui seront présentées ne sont pas étrangères à l’Épouse, ce sont pour elle des proches, et qui lui appartiennent. Et comme le Prophète avait dit « au roi », il lui adresse maintenant la parole en disant : « A vous : ses proches vous seront présentées ».
31. « Elles seront présentées dans la joie et ce dans l’allégresse, elles seront amenées au temple du roi. ». Ce temple du roi, c’est l’Église même, et l’Église même entre dans le temple du roi. De quoi ce temple est-il construit ? des hommes qui entrent dans ce temple. Quelles en sont les pierres vivantes, sinon les fidèles de Dieu ? On les amènera dans le

  1. 1 Tim. 6,17-19
  2. Act. 4,34
  3. Mt. 6,1
  4. Id. 5,16
  5. Ps. 44,15
  6. Id.
  7. Id.
  8. Id. 16