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passion. Écoutez, nous dit-il, quel est ce fruit : je ne le cache point ; mais l’homme est sourd à mes paroles. Écoutez donc bien quel est ce fruit acheté par mes douleurs. « J’annoncerai votre nom à mes frères ». Voyons s’il ne prêche le nom du Seigneur à ses frères, que dans une partie du monde. « J’annoncerai votre nom à mes frères, je vous chanterai au milieu de l’Église[1] ». C’est ce qui s’accomplit maintenant. Mais voyons quelle est cette Église : « Je vous chanterai au milieu de l’Église ». Voyons donc l’Église pour laquelle il a souffert.
24. « Louez le Seigneur, vous qui le craignez[2] ». L’Église du Christ est donc partout où l’on craint et où l’on bénit Dieu. Or, voyez, mes frères, si dans ces jours il n’y a point de sens dans le chant de l’Amen, et de l’Alléluia qui retentit par toute la terre. Est-ce que Dieu n’y est pas craint ? Est-ce que le Seigneur n’y est pas béni ? Voilà que Donat s’en vient nous dire : Il n’y a plus de crainte, et le monde entier a péri, il a tort de dire le monde entier ; n’en restera-t-il donc qu’une faible part en Afrique ? Mais le Christ n’a-t-il donc pas une parole pour fermer la bouche à ces prédicateurs ? N’a-t-il pas une parole pour leur arracher la langue ? Cherchons, nous la trouverons peut-être. Quand le Christ doit u bénir Dieu au milieu de l’Église », c’est de notre Église qu’il parle. « Bénissez le Seigneur, « vous qui craignez Dieu n. Voyons si nos adversaires louent le Seigneur, afin de coin-prendre si c’est bien d’eux qu’il parle, s’il est béni dans leur Église. Comment bénissent-ils le Christ, ceux qui prêchent qu’il a perdu toute la terre, que le diable l’a conquise sur lui, qu’il ne lui en reste qu’une partie ? Mais voyons encore, et que le psaume parle avec plus de clarté, qu’il s’explique avec plus d’évidence ; qu’il n’y ait plus besoin d’interprétation, qu’il mie reste aucun doute. « Glorifiez-le, race entière de Jacob ». Peut-être diront-ils encore : C’est nous qui sommes la race de Jacob. Voyons s’ils sont en effet cette race,
25. « Qu’il soit craint de toute la postérité d’Israël[3] ». Qu’ils disent encore qu’ils sont la race d’Israël, nous leur permettons de le dire. « Car il n’a point méprisé ni rejeté la prière des pauvres ». De quels pauvres ? de ceux qui ne présumaient point d’eux-mêmes. Jugeons par là s’ils sont pauvres, ceux qui disent : « Nous sommes justes », quand Jésus-Christ dit lui-même : « Les cris de mes péchés éloignent de moi le salut[4] ». Mais qu’ils disent encore ce qu’il leur plaira. « Il n’a point détourné de moi son visage, et quand je criais vers lui il m’a exaucé[5] ». En quoi l’a-t-il exaucé, pour quel motif ?
26. « Vous êtes l’objet de ma louange[6] ». Il met sa gloire en Dieu pour nous apprendre à ne point présumer de l’homme. Qu’ils disent encore ce qu’ils voudront. Déjà ils commencent à sentir l’effet du feu qui s’approche : « Car nul ne peut se dérober à sa chaleur[7] ». Qu’ils disent encore : Nous ne présumons pas non plus en nous-mêmes, et c’est en Dieu que nous mettons notre gloire ; qu’ils disent même : « Je chanterai vos louanges dans une grande assemblée ». Il me semble qu’ici le Christ les touche au cœur. Qu’est-ce, mes frères, qu’une grande Église ? Appellerait-on grande Église un coin de la terre ? Une grande Église, c’est l’univers entier. Quelqu’un voudrait-il contredire le Christ ? Voici vos paroles, ô Christ : « Je chanterai vos louanges dans une grande Église » ; dites-nous donc quelle est cette Église ! Vous êtes resserré dans un coin de l’Afrique ; vous avez perdu le monde entier, vous avez versé votre sang pour tous ; mais l’ennemi a envahi vos domaines. Si nous parlons ainsi, mes frères, c’est comme pour l’interroger, car nous savons ce qu’il y aurait à répondre. Supposons néanmoins que nous ignorons ce qu’il dit : sa réponse n’est-elle point : Attendez, je vais parler de manière à lever tous les doutes ? Écoutons donc ce qu’il va dire. Pour moi, je voulais prononcer, et ne point laisser aux hommes la liberté d’interpréter cette parole du Christ : « Dans une grande Église ». Et tu viens me dire qu’il est resserré à l’une des extrémités ? Ils oseront encore nous dire : Notre assemblée est grande, que dites-vous de Bagaï et de Tamugade ? Si le Christ n’a plus un mot pour les confondre, ils diront que la Numidie seule est cette grande Église.
27. Voyons encore, écoutons Jésus-Christ. « J’accomplirai mes vœux en présence de ceux qui le craignent[8] ». Quels sont les vœux du Christ ? le sacrifice qu’il offrit à Dieu. Savez-vous quel sacrifice ? Les fidèles savent les

  1. Ps. 21,23
  2. Id. 24
  3. Id. 25
  4. Ps. 21,2
  5. Id. 25
  6. Id. 26
  7. Ps. 18,7
  8. Ps. 21,26