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âmes, à laquelle nous devons tous courir, dans laquelle nous devons tous travailler à vivre, et à vivre de manière à y persévérer jusqu’à la fin, ne convenait-il pas que le Sauveur nous instruisit aussi de la résurrection des corps qui s’accomplira à la fin du monde ? Écoutez comment il nous en parle.
9. Il vient de dire : « En vérité je vous le déclare, l’heure viendra, et c’est maintenant, où les morts », c’est-à-dire les infidèles, « entendront la voix du Fils de Dieu », l’Évangile ; « et ceux qui l’auront entendue », qui y auront obéi, « vivront », seront justifiés, ne seront plus infidèles. Après donc avoir parlé ainsi, il remarque qu’il doit nous instruire aussi de la résurrection de la chair et ne pas nous laisser dans notre ignorance ; il poursuit alors son discours. « De même, dit-il, que le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d’avoir en lui-même la vie. » Ceci se rapporte encore à la résurrection, à la justification des âmes. Jésus ajoute : « Il lui a donné aussi le pouvoir de juger, parce qu’il est le fils de l’homme. » Ainsi le Fils de Dieu est en même temps fils de l’homme, et s’il était resté Fils de Dieu sans devenir fils de l’homme, il ne sauverait pas les enfants des hommes. Mais après avoir fait l’homme, il est devenu ce qu’il a fait, pour ne pas le laisser périr. Toutefois, en se faisant homme, il est resté Fils de Dieu ; car il s’est fait homme en prenant ce qu’il n’était pas, sans sacrifier ce qu’il était ; en restant Dieu il s’est fait homme. Il a pris ce que tu es, sans – s’y perdre, et c’est ainsi qu’il est venu parmi nous, Fils de Dieu et fils de l’homme tout à la fois, formateur et formé, créateur et créé, créateur de sa mère et créé de son sang ; c’est donc ainsi qu’il s’est présenté à nous. Or, c’est comme Fils de Dieu qu’il a dit : « Viendra l’heure, et c’est maintenant, que les morts entendront la voix du Fils de Dieu ; » du Fils de Dieu et non du Fils de l’homme, car il s’agissait ici de la vérité, et comme Vérité le Fils est égal au Père. « Et ceux qui l’auront entendue, vivront. Car, de même que le Père à la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d’avoir en lui-même la vie ; » en lui-même et non dans autrui. Pour nous, si nous avons la vie, ce n’est pas en nous mais en notre Dieu ; tandis que le Père a la vie en lui et qu’en engendrant son Fils il lui a accordé d’avoir aussi la vie en soi, d’être lui-même une source de vie à laquelle nous devons puiser, oui, d’avoir la vie en lui-même, d’être lui-même la vie. Quant à sa qualité de fils de l’homme, c’est de nous qu’il l’a reçue. Considéré en lui-même, il est Fils de Dieu, et par nous il est fils de l’homme ; Fils de Dieu par sa nature, fils de l’homme par la nôtre. Mais s’il a reçu de nous ce qu’il y a de moindre en lui, il nous a communiqué ce qu’il y a en lui de plus grand. Il est mort en effet, non en tant que Fils de Dieu, mais en tant que fils de l’homme ; et cependant c’est le Fils de Dieu qui est mort, mort selon la chair et non comme étant le Verbe qui s’est fait chair et qui a habité parmi nous [1]. Il est donc mort, mort dans ce qu’il tenait de nous ; et si nous vivons, c’est à lui que nous en sommes redevables. Comme il ne pouvait mourir par lui-même, nous ne saurions vivre par nous. C’est donc comme Dieu, comme Fils unique de Dieu, comme égal à son Père, que le Seigneur Jésus nous promet la vie, si nous l’écoutons.
10. Dieu donc, continue-t-il, « lui a donné aussi le pouvoir de juger, parce qu’il est fils de l’homme. » Aussi c’est comme homme qu’il viendra juger, et c’est pour nous l’apprendre qu’il dit : « Dieu lui a donné aussi le pouvoir de juger, parce qu’il est le fils de l’homme. » Le Fils de l’homme sera donc notre Juge ; la nature qui a été jugée en lui, jugera à son tour. En voulez-vous une nouvelle preuve ? Écoutez. Un prophète avait dit bien auparavant : « Ils verront Celui qu’ils ont percé ?[2] » Oui ils verront cette même nature qu’ils ont frappée à coup de lance. Ils verront siéger comme juge, Celui qu’ils avaient vu debout devant un juge ; et condamner de vrais coupables, Celui qui a été faussement condamné comme coupable. Il viendra en personne, il viendra dans sa nature humaine. C’est ce qu’enseigne aussi l’Évangile. Au moment où il montait au ciel sous les yeux de ses disciples, ceux-ci restaient debout et le regardaient, et tout-à-coup ils entendirent ces paroles qui leur étaient adressées par des Anges : « Hommes de Galilée, pourquoi vous tenez-vous-là ?, etc. Ce Jésus viendra de la même manière que vous l’avez vu allant au ciel[3]. » Que signifie de la même manière ? Il viendra avec la même nature, « car il a reçu le pouvoir de juger, comme étant le fils de l’homme. » Or, voyez s’il n’était pas nécessaire, s’il n’était pas juste que les hommes vissent leur Juge ? Devant lui devaient comparaître les bons et les méchants. Mais il est dit : « Heureux ceux qui ont

  1. Jn. 1, 14
  2. Jn. 19, 37 ; Zac. 12,10
  3. Act. 1, 11