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en trouver avec vous ; s’il y en avait dans l’une de vos terres, dans un lieu qui vous appartint ; si je vous y voyais fouiller et que je vous demandasse : Que cherchez-vous ? Vous me répondriez : De l’or. Je vous dirais de mon côté Vous cherchez de l’or ; j’en cherche comme vous ; mais vous ne cherchez pas où nous en pourrons trouver. Apprenez donc de moi où il s’en rencontre. Je ne veux pas vous le ravir, mais vous montrer l’endroit où il est ; ou plutôt, suivons tous Celui qui sait où se trouve ce que nous cherchons. Ainsi en est-il aujourd’hui : Vous êtes désireux de vivre et d’avoir des jours heureux ; nous ne pouvons vous détourner de ce désir, mais nous vous disons : Ne cherchez pas dans ce monde cette vie ni ces jours heureux, car les jours n’y sauraient être heureux et la vie même n’y ressemble-t-elle pas à la mort ? Ces jours passent en courant ; aujourd’hui fait disparaître hier, et demain ne paraîtra que pour faire disparaître aujourd’hui ; ils ne s’arrêtent pas, et conduit par eux tu voudrais t’arrêter ? Ah ! je suis loin de comprimer, j’enflamme plutôt en vous le désir de la vie et des jours heureux. Oui, cherchez la vie et des jours heureux ; mais cherchez-les où ils se trouvent.
6. Voulez-vous prendre avec moi conseil de Celui qui sait où se rencontrent et cette vie en ces jours heureux ? Écoutez, non, pas moi, mais lui avec moi. Il nous est dit par quelqu’un : « Venez mes enfants, écoutez-moi. » Courons et arrêtons-nous, prêtons l’oreille et comprenons le langage du Père qui nous dit : « Venez, mes enfants, écoutez-moi. Je vous enseignerai la crainte du Seigneur », ajoute-t-il. Voilà donc ce qu’il veut nous apprendre. – Mais à quoi sert cette crainte ? Le voici dans les paroles qui suivent : « Quel est l’homme qui veut vivre et qui aime à avoir des jours heureux ? » Nous répondons tous : C’est nous. Écoutons alors ce qui vient ensuite : « Préserve ta langue du mal, et tes lèvres de toute parole artificieuse. » Ici encore réponds : Je le veux. Quand je disais tout à l’heure : « Quel est l’homme qui veut vivre et qui aime à voir des jours heureux ? » nous répondions tous : C’est moi. Qu’ici donc on me réponde aussi : C’est moi. À ces mots : « Préserve ta langue du mal, et tes lèvres, de toute parole artificieuse », réponds donc également : Je le veux. Quoi ! tu veux la vie et des jours heureux, et tu refuses de préserver ta langue du mal et tes lèvres des paroles frauduleuses ? Vif pour la récompense, tu es si lent pour le travail ! Qui donc, sans travailler, obtient une récompense ? Plut à Dieu que chez toi l’ouvrier fut toujours récompensé 1 Je sais que tu ne donnes rien à qui ne travaille pas. Pourquoi ? Parce que tu ne lui dois rien, Dieu aussi nous offre une récompense. Laquelle ? « La vie et les jours heureux » après lesquels nous soupirons tous et que tous nous essayons de nous procurer. Après l’avoir promise, il accordera aussi cette récompense, la récompense de la vie et des jours heureux. Et en quoi consistent ces jours heureux ? Dans une vie sans fin, dans un repos sans fatigue.
7. La récompense est grande ; à quelles conditions la met-il ? Voyons-le, et pleins d’ardeur pour de telles promesses, préparons, pour lui obéir, toutes nos forces, et nos mains et nos bras. Va-t-il nous commander de porter des fardeaux énormes, de creuser la terre ou de dresser quelque puissante machine ? Il n’ordonne rien de si laborieux ; il te commande seulement de dompter le plus agile de tes membres : « Préserve, dit-il, ta langue du mal. » Il n’en coûte pas de bâtir une demeure, et il en coûte de retenir sa langue ! « Préserve ta langue du mal ; » évite le mensonge, évite les accusations, évite les calomnies, évite les faux témoignages, évite les blasphèmes : « Préserve ta langue du mal. » Considère comment tu te fâches quand on parle mal de toi. Eh bien ! comme tu te fâches contre qui parle mal de toi, fâche-toi contre toi-même quand tu parles mal d’autrui. « Préserve tes lèvres de toute parole artificieuse. » Exprime simplement ce que tu as dans le cœur ; qu’il n’y ait pas dans l’esprit autre chose que ce qui est sur la langue. « Évite le mal et pratique le bien. » Eh ! comment dire à quelqu’un : Donne des vêtements à ce pauvre qui en manque, s’il cherche à dépouiller celui qui en a ? Comment recueillir un étranger, quand on tourmente un concitoyen ? L’ordre donc le demande : « Évite le mal, puis fais le bien ; » ceins-toi les reins d’abord, puis allume ta lampe. Tu pourras alors attendre tranquillement « la vie et les jours heureux. Cherche « la paix et la poursuis [1] ; » et tu diras avec confiance au Seigneur : J’ai fait ce que vous m’avez commandé, accomplissez ce que vous m’avez promis.

  1. Psa. 33, 12-15