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car « je louerai en Dieu sa parole, je glorifierai la pensée dans le Seigneur ; j’ai mis ma confiance en Dieu, je ne craindrai rien des entreprises de l’homme [1]. – Il n’y aura personne pour les épouvanter. »
28. « Et je ferai naître pour eux une pépinière de paix. » Un testament de paix, une pépinière de paix. Puisse donc fructifier ce que Dieu a planté et se déraciner ce qu’a semé l’hérétique Dieu a planté ce qui le concerne lui-même et ce qui concerne son Église ; lui-même dans le ciel, et son Église sur la terre ; lui-même sur tous les cieux et son Église sur toute la terre ; voilà une doctrine qui vient de Dieu. Mais ce langage vient à nous, sois du parti de Donat, l’Église n’est qu’en Afrique ; ce n’est pas Dieu qui l’inspire, je ne, vois pas ici un plant divin. Il faut donc le déraciner et non pas l’arroser. « Et je ferai naître pour eux une pépinière de paix, et ils ne mourront plus de faim sur la terre. » Il est bien vrai, mes frères, que la faim se fait sentir ici ; examinez et voyez comme ils sont pressés par la faim. Ce qui est pis, c’est qu’ils ont des aliments à la bouche, sans manger, semblables à ces malades qui meurent de dégoût, non que la nourriture leur manque, mais parce qu’ils la rejettent et l’ont en horreur. Les Écritures n’enseignent-elles pas ce que nous disons et n’entendent-ils pas aussi bien que nous ces paroles d’un psaume : « Toutes les extrémités de la terre se souviendront du Seigneur et s’attacheront à lui ; toutes les nations se prosterneront devant lui[2] ? » Ainsi les aliments sont tout servis ; si tu avais la santé et si tu mangeais, demeurerais-tu où tu es?« Et il n’y aura plus personne pour mourir de faim sur la terre, et ils ne seront plus chargés de la malédiction des peuples. » Il est bien vrai, mes frères, que le Christ a aujourd’hui élevé si haut son Église, que tous ses ennemis sont confus et n’osent plus blasphémer son nom. Le seul reproche qu’ils nous adressent est celui-ci : Pourquoi, disent-Ils, ne vous entendez-vous pas ? Ainsi ceux qui sont restés païens parmi les gentils n’ont plus rien à objecter contre le Christ et ils ne blâment plus dans les chrétiens que leurs divisions. Mais ceux qui passent de l’hérésie à l’Église catholique n’ont plus à craindre cet opprobre, on ne leur reprochera point leurs dissensions, puisqu’ils demeurent attachés à la racine de l’unité sur le plant de la charité. « Ils ne seront pas chargés de la malédiction des peuples.
29. « Et ils sauront que je suis le Seigneur leur Dieu, et eux-mêmes sont mon peuple, la maison d’Israël, dit le Seigneur Dieu. » Ils sont les ouailles du Seigneur, ils sont aussi sa vigne. Après avoir condamné la vigne stérile, Isaïe craignait de n’être pas compris ; aussi expliqua-t-il sa pensée en disant : « La vigne du Seigneur des armées est la maison d’Israël [3] ; » et les Israélites ne pouvaient plus dire alors : On ne nous a point parlé, mais à je ne sais quelle vigne. De même après avoir parlé de brebis, Dieu craignait que quelqu’un n’élevât cette objection Peut-être le Seigneur a-t-il je ne sais où des brebis dont il prend soin et que je ne connais pas. Pour faire cette objection, il faudrait, il est vrai, avoir perdu le sens commun, être tombé dans l’absurdité ; mais le bon Pasteur compatit à la faiblesse, il s’abaisse jusqu’à prévenir de telles pensées, et il finit par expliquer très-clairement quelles sont ses brebis. « Et vous, mes brebis, vous les brebis de mon troupeau, vous êtes des hommes. » Quels hommes ? Est-ce tous les hommes ? Non. Car il est écrit : « Heureux celui dont le Seigneur est l’espérance[4] ; – Que le Dieu d’Israël est bon pour ceux qui ont le cœur droit[5] ! – Heureux l’homme dont le Seigneur est le Dieu[6]. »
30. « Et moi le Seigneur je suis votre Dieu, dit le Seigneur Dieu. » Dieu est également au-dessus de tous les hommes. Je ne sais néanmoins comment il se fait que pour oser dire : mon Dieu ! il n’y ait que celui qui croit en lui et qui l’aime. Celui-ci dit : mon Dieu ! Tu l’as donc fait tien, et ce Dieu, à qui tu es, aime véritablement cela. Ah ! de toute l’affection de ton cœur, avec toute la sécurité, la confiance et l’amour dont tu es capable, répète : Mon Dieu ! Ne crains rien, tu dis vrai ; il est à toi et tu ne l’empêches pas d’être encore à autrui. Tu ne dis pas : mon Dieu, comme tu dis : mon coursier. Celui-ci est à toi et non pas à un autre. Mais si Dieu t’appartient, il appartient aussi à ceux qui disent : Mon Dieu, comme tu le dis. Chacun dit : Mon Dieu, mon Dieu ; c’est qu’il est à tous, se communiquant tout entier, pour qu’ils jouissent de lui, à tous et à chacun. Car en disant : Mon Dieu, on ne le divise pas. Ce discours que jette ma langue et que porte le son, formé de lettres et de syllabes, parvient tout entier à chacun et nul de ceux qui l’entendent ne le divise ; or si ce discours qui retentit sensiblement

  1. Ps. 55, 11
  2. Id. 21, 28
  3. Is. 5, 7
  4. Ps. 39, 5
  5. Id. 72, 1
  6. Id. 145, 5