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de la Galilée et de la Judée ainsi que de la ville de Jérusalem et la vertu du Seigneur agissait pour la guérison des malades. En ce même temps quelques personnes, portant. sur un lit un homme qui était paralytique, tâchaient de le faire entrer et de le déposer devant lui. Mais ne trouvant point de passage à cause de la foule du peuple, ils montèrent sur le toit et le descendirent par les tuiles au milieu de l’assemblée devant Jésus ; qui, voyant leur foi dit : O homme, tes péchés te sont. remis[1]. » Reste donc à voir comment on peut concilier saint Marc et saint Matthieu ; puisque saint Matthieu dit que le fait se passa dans la cité de Jésus et que d’après saint Marc ce fut à Capharnaüm. La difficulté serait autrement grave si saint Matthieu avait nommé Nazareth. Mais il a bien pu appeler cité de Jésus la Galilée elle-même où Nazareth était située. En effet, on appelle cité Romaine tout l’empire, qui comprend tant de villes. De plus, lin prophète donne le nom de cité à l’Église répandue par toutes les nations, quand il dit : « On a publié de toi des choses admirables, cité de Dieu[2]. » L’Écriture même nomme maison d’Israël le premier peuple de Dieu, qui habitait cependant un si grand nombre de villes[3]. Ne voit-on pas alors que ce fut dans sa cité même que Jésus opéra le miracle dont il s’agit, quand il l’opéra à Capharnaüm ville de Galilée, où il était revenu du pays des Géraséniens lorsqu’il repassa le lac ? Quelle que fût la ville de son séjour en Galilée, on pouvait justement dire qu’il était dans sa cité ; à plus forte raison quand il se trouvait à Capharnaüm, qui dominait les autres villes de la province ail point d’en être comme la métropole. Si cependant rien n’autorisait à prendre pour la cité de Jésus-Christ, soit la Galilée elle-même, où était située Nazareth, soit la ville de Capharnaüm, qui était comme la capitale des villes de Galilée ; nous dirions que saint Matthieu a omis le récit de ce qui se passa depuis le retour de Jésus dans sa cité jusqu’à son arrivée à Capharnaüm, et qu’il a rapporté aussitôt la guérison du paralytique ; comme font souvent les évangélistes qui négligent, sans en avertir, certains faits intermédiaires, et semblent laisser croire que les autres ont suivi immédiatement.

CHAPITRE XXVI. VOCATION DE SAINT MATTHIEU.

59. Saint Matthieu continue ainsi : « Jésus sortant de là vit un homme nommé Matthieu, qui était assis au bureau des impôts, et il lui dit : Suis-moi. Aussitôt il se leva et le suivit[4]. » Saint Marc gardant le même ordre raconte aussi ce fait après la guérison du paralytique : « Jésus, dit-il, étant sorti pour aller du côté de la mer, tout le peuple venait à lui ; et il les instruisait. Et lorsqu’il passait, il vit Lévi, fils d’Alphée, assis au bureau des impôts et il lui dit : Suis-moi. Cet homme se leva aussitôt et le suivit[5]. » Point contradictoire ; le même homme s’appelle à la fois Matthieu et Lévi. C’est encore après la guérison du paralytique que saint Luc expose le même fait : « Après cela, « dit-il, Jésus sortit et voyant un publicain nommé Lévi assis au bureau des impôts, il lui dit Suis-moi. Et quittant tout Lévi se leva et le suivit[6]. » Ce qui porte à croire que saint Matthieu rapporte ce t’ait comme un fait omis précédemment, c’est qu’on doit regarder sa vocation comme antérieure au discours prononcé sur la montagne. Car au dire de saint Luc, les douze que Jésus avait choisis dans le nombre de ses disciples et qu’il avait appelés Apôtres, se trouvaient tous avec lui sur cette montagne[7].

CHAPITRE XXVII. FESTIN DONNÉ PAR SAINT MATTHIEU.

60. Saint Matthieu poursuit ainsi : « Or il arriva que Jésus étant à table dans la maison, beaucoup de publicains et de gens de mauvaise vie vinrent s’y asseoir avec lui et avec ses disciples », etc, jusqu’à l’endroit où nous lisons : « Mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et tous deux se conservent[8]. » Ici l’évangéliste ne dit pas dans la maison de qui Jésus mangeait avec des publicains et des pécheurs. On pourrait croire alors que son récit ne présente pas ce fait dans l’ordre chronologique et qu’il s’agit d’un fait arrivé dans un autre temps et dont le souvenir lui revient. Mais saint Marc et saint Luc, qui le racontent absolument de même, déclarent que Jésus était à table chez Lévi ou Matthieu, le nouveau disciple, et que là fut dit tout ce qui suit. Car à ce sujet, voici en

  1. Luc. 5, 17-26
  2. Psa. 86, 3
  3. Is. 5, 7 ; Jer. 3, 20 ; Eze. 3, 4
  4. Mat. 9, 9
  5. Mrc. 2, 13-14
  6. Luc. 5, 27-28
  7. Id. 6, 13
  8. Mat. 9, 10-17