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s’élèvera dans les nuées ? » Comme le lui a commandé Celui qui a dit : « Et quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai tout à moi[1]. » Il allait mourir pour nous, et après sa résurrection monter au ciel : « Partout où sera le corps, dit-il, là se rassembleront les aigles[2]. » Car il a rassasié de biens surnaturels celui dont la jeunesse se renouvellera comme celle de l’aigle[3]. L’élévation de l’aigle peut se rapporter aussi à ce passage de saint Paul : « Si nous sommes « emportés comme hors de nous-même, c’est pour « Dieu ; » comme le passage suivant relatif au vautour se rapporte à cet autre du même l’Apôtre « Si nous sommes plus retenus, c’est pour vous[4]. » Le voici : « Et que le vautour attendra près de son nid perché sur les rochers ? » Il n’exprime plus l’état d’une âme qui s’élève dans les contemplations d’un saint ravissement, mais le dévouement de celle qui, en des voies moins élevées, s’occupe avec patience du salut des hommes et qui veut que les impies morts à la grâce soient justifiés parla parole, comme dévorés par elle, pour entrer dans le corps de l’Église. On sait que le vautour se nourrit de cadavres. C’est pourquoi il est près de son nid où il dépose ses veufs, figure des œuvres qu’il faut accomplir en cette vie. Il est « sur le rocher ; » car après avoir dit : « Si nous sommes plus retenus, « c’est pour vous », l’Apôtre ajoute immédiatement : « Car la charité du Christ nous presse[5]. » « Or, la pierre était le Christ[6]. – Il attendra immobile. » C’est bien la même pensée que dans ce passage : « Je me sens pressé des deux côtés je voudrais mourir et être avec Jésus-Christ, ce qui est sans contredit le meilleur », et se rapporte à l’élévation de l’aigle. D’un autre côté, comme le vautour attendant près de son nid « Je veux vivre encore, ce qui est nécessaire pour vous[7]. » Or, comme la pierre désigne encore l’Église tout entière, la pointe du rocher, c’est le chef de l’Église. Voilà pourquoi Simon fut appelé Pierre par Notre-Seigneur[8]. Les expressions qui suivent expriment cette pensée
28. « Dans les cavités, sur la pointe des rochers. » La pointe désigne notre chef, le creux du rocher signifie la vie cachée en Dieu avec Jésus-Christ[9]. « Et là il cherche sa proie », selon ce qui fut dit à Pierre : « Tue et mange[10] ; » afin d’incorporer à l’Église ceux d’entre les Gentils qui devaient croire.
29. « Son regard plonge dans le lointain ;
30. « Et ses petits roulent dans le sang », L’espérance d’une vie immortelle dans le séjour de l’éternité dirige au loin son intention, quoique ses actes extérieurs semblent se traîner dans les défaillances de la nature : le doute vient quelquefois l’agiter ; l’ignorance, inhérente à l’esprit humain, l’empêche de voir le mérite réel que. Dieu attache à son dévouement et à son zèle ; mais comme son regard découvre dans le lointain le salut éternel, il sait toujours agir avec une charité entièrement désintéressée. Et s’il a donné ses soins, distribué ses trésors à des hommes qui, en renonçant au démon, sont complètement morts au monde, il s’empresse autour d’eux par le ministère de la parole et multipliant ses discours, il unit au corps de l’Église ces hommes si bien disposés. Aussi est-il dit encore : « Ils apparaissent soudain, là où gisent les cadavres. »
31. « Alors le Seigneur répondit, et dit. » Si le Seigneur semble se répéter en parlant, c’est que Job, saisi de crainte à ces discours, est reste muet, et n’a osé rien répondre. Dans les deux versets qui suivent, Dieu l’engage à parler.
32. « Celui qui discute avec le Très-Haut sera-t-il en repos ? » C’est-à-dire : Pourquoi gardes-tu le silence en discutant avec le Tout-Puissant ? « Celui qui osait reprendre Dieu lui répondra-t-il ainsi ? » C’est bien une interrogation, et voici le sens : Reprend-il Dieu, celui qui en discutant sait lui répondre ? On peut discuter avec le Tout-Puissant, en lui adressant ses questions, sans l’attaquer ni le réfuter. Ce n’est point parce qu’il est Tout-Puissant qu’il faut éviter toute discussion avec lui. On ne l’accuse pas non plus, si dans cette discussion on l’interroge comme la vérité même. Quant à ces paroles « Celui qui discute avec le Seigneur sera-t-il en repos ? » en voici donc le sens : puisque celui qui discute avec le Seigneur n’est pas en repos, il ne faut pas entrer en discussion avec lui pour se mettre en repos ensuite. Ordinairement celui qui discute propose quelques objections : or, celui qui en fait à Dieu ne peut être en repos, il ne peut trouver aucun repos, qu’en conformant ses pensées à la volonté de Dieu, sans rien contredire. Car « celui qui reprend Dieu lui répondra ainsi : » c’est-à-dire, s’il répond en discutant avec lui, c’est pour le reprendre, et il ne peut être en repos. D’où cette parole : « O

  1. Jn. 12, 32
  2. Mat. 24, 28
  3. Psa. 102, 5
  4. 2Co. 5, 13
  5. Id. 5, 13-14
  6. 1Co. 10, 14
  7. Phi. 1, 23-24
  8. Mrc. 3, 16
  9. Col. 3, 3
  10. Act. 11, 7,