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s’adressent au Christ. « Vous avez brisé mes chaînes, je vous offrirai en sacrifice une victime de louanges[1]. » Celui qui avait le pouvoir de donner sa vie et de la reprendre [2], n’a point porté le joug sur sa chair.
3. Le texte ajoute : « Et tu la donneras au prêtre Eléazar. » Pourquoi pas à Aaron ? N’était-ce point une annonce figurative que la passion du Seigneur ne devait pas arriver dans ce temps-là, mais sous les successeurs du sacerdoce d’alors ? « Et ils la jetteront hors du camp : » c’est ainsi que le Sauveur fut conduit hors de la ville pour souffrir sa passion. Quant à ces mots : « Dans un lieu pur » ils signifient que le Christ est mort innocent. « Et ils l’immoleront devant lui » c’est ainsi que la chair du Christ fut immolée en présence de ceux qui allaient devenir les prêtres du Seigneur sous le Testament nouveau.
4. « Eléazar prendra de ce sang, et il en fera sept fois l’aspersion vers la face du tabernacle du témoignage. » Ce rit est la preuve que le Christ a, conformément aux Écritures, répandu son sang pour la rémission des péchés [3]. « Vers la face du tabernacle du témoignage » c’est-à-dire, que tout dans ce grand évènement, est arrivé selon le témoignage que Dieu lui-même avait rendu par avance. Enfin « sept fois » nombre sacré qui signifie la sanctification spirituelle opérée parle sang du Christ.
5. « Et ils la brûleront en sa présence. » Je pense que ce rit est un symbole de la résurrection. Car le feu tend de sa nature à monter, et à transformer en sa substance ce qu’il brûle. Cremare, brûler, vient d’ailleurs d’un mot grec qui veut dire : suspendre, entraîner après soi. L’Écriture ajoute : « en sa présence » c’est-à-dire, en présence du prêtre : paroles qui sont placées là, ce me semble, pour marquer l’apparition du Christ ressuscité à ceux qui devaient avoir part au sacerdoce royal. Ce qui suit : « On brûlera sa peau et ses chairs, et son sang avec ses excréments » explique en détail la manière dont on brûlera la victime ; ce passage renferme en même temps de mystérieuses significations : la peau, les chairs et le sang sont une figure de la substance mortelle du corps de Jésus-Christ ; et le mépris et les outrages du peuple, figurés, à mon sens, par les excréments de la victime, doivent tourner à la gloire du Christ, symbolisée à son tour par la flamme du bûcher.
6. « Le prêtre prendra ensuite du bois de cèdre, de l’hysope et de l’écarlate, et il les jet » fera au milieu du feu où brûle la génisse. » Le bois de cèdre est le symbole de l’espérance, qui doit toujours habiter dans les cieux. L’hysope, plante modeste qui fixe ses racines dans le rocher, est l’image de la foi. L’écarlate, qui emprunte au feu ses vives couleurs, figure la charité, qui n’est autre que la ferveur de l’esprit. Voilà les trois choses, que nous devons jeter dans la résurrection du Christ comme dans une sorte de foyer embrasé, afin que notre vie soit cachée avec la sienne, selon ce mot de l’Apôtre « Votre vie est cachée en Dieu avec le Christ[4]. »
7. « Le prêtre lavera ses vêtements, et son corps dans l’eau ; il entrera ensuite dans le camp, et sera impur jusqu’au soir. » Que signifie cette ablution du corps et des vêtements, si ce n’est la pureté extérieure et intérieure à la fois ? Voilà pour le prêtre. On lit ensuite : « Et celui qui la brûlera, lavera ses vêtements et son corps dans l’eau, et il sera impur jusqu’au soir. » Cet homme qui brûle la victime est, selon moi, la figure de ceux qui ensevelirent la chair du Christ, la préparant ainsi à la résurrection comme à une sorte de bûcher glorieux.
8. « Et un homme pur ramassera la cendre de la génisse, et la placera hors du camp dans un lieu pur. » Que devons-nous entendre par la cendre de la génisse, en d’autres termes, par les restes de la victime immolée et livrée aux flammes, si ce n’est la renommée glorieuse qui a suivi la passion et la résurrection du Christ ? « Car des restes demeurent à l’homme pacifique[5]. » En effet, le Christ était une sorte de cendre, parce qu’il passait, aux yeux de ceux qui n’avaient pas la foi, pour un mort digne de mépris ; et néanmoins il purifiait en même temps les âmes, en qui existait la foi à sa résurrection. Et comme cette renommée jeta son éclat le plus vif parmi ceux qui vivaient au milieu des gentils, sans appartenir au peuple, juif, j’estime que c’est la raison d’être de ces paroles : « Et un homme pur ramassera la cendre de la génisse ; » cet homme sera évidemment pur de la mort du Christ, qui fut le crime des Juifs. « Et il la placera dans un lieu pur » c’est-à-dire qu’il la traitera avec honneur ; cependant il la portera « hors du camp » parce que la gloire de l’Évangile a brillé en dehors des cérémonies célébrées chez les Juifs. « Et l’assemblée des enfants d’Israël la

  1. Psa. 115, 16, 17
  2. Jn. 10, 18
  3. Rom. 3, 25 ; Eph. 1, 7
  4. Col. 3, 3
  5. Psa. 36, 37