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ne cesse pas d’être assujettie à l’ordre : elle est bonne, si on la considère dans l’ensemble des êtres. Ainsi l’homme avant sa faute, était bon en soi ; mais l’Écriture a passé sous silence cette bonté pour faire sentir sa déchéance future, elle l’a mis à sa place, car si un être est bon en lui-même, il est meilleur encore dans le tout dont il fait partie ; mais, quoiqu’il soit bon dans le tout, il ne s’ensuit pas qu’il soit bon en lui-même. Les expressions sacrées unissent donc, par un, juste tempérament, la vérité actuelle avec la prescience de l’avenir. Dieu n’est pas seulement le Créateur excellent des êtres, il est aussi l’ordonnateur équitable qui règle le sort des pécheurs : par conséquent un être peut se dégrader par ses fautes, sans cesser d’être une beauté dans l’ordre universel. Mais poursuivons notre sujet et commençons un nouveau Livre.

LIVRE IV. LES JOURS DE LA CRÉATION.

CHAPITRE PREMIER. QUE FAUT-IL ENTENDRE PAR LES SIX JOURS ?


1. « Les cieux donc et la terre furent achevés avec tout ce qui les embellit. Et Dieu acheva le sixième jour les œuvres qu’il avait fanés. Et il se reposa le septième jour de toutes les œuvres qu’il avait faites. Et Dieu bénit le septième jour et il le sanctifia, parce qu’en ce jour-là il s’était reposé de toutes les œuvres qu’il avait faites, dès le commencement. » Malgré tous les efforts de l’attention, il est difficile et presque impossible de découvrir par, la pensée quelle est l’idée de l’écrivain sacré dans cette énumération des six jours et de résoudre le problème que voici : Ces six jours avec le septième se sont-ils écoulés réellement et ressemblent-ils à ceux que la marche du temps ramène, puisque les jours se suivent et ne reviennent jamais ? Ou bien, loin de s’être écoulés, comme les jours dont ils portent le nom, dans un temps régulier, ne sont-ils qu’un idéal inhérent à l’essence même des choses ? Faut-il voir non seulement dans les trois jours qui ont précédé la formation des luminaires, mais encore dans les trois suivants, les mouvements opérés dans les êtres, de telle sorte que le mot jour désigne leurs formes, la nuit, l’absence de ces formes ou leur caractère défectible ? Qu’on prenne tout autre expression, si l’on veut, pour exprimer le changement qui s’opère dans un être, lorsqu’il perd ses qualités par une dégradation insensible et qu’il se dépouille de ses formes ; car toute créature est sujette à ce changement, lors même qu’elle n’y serait pas soumise effectivement, comme il arrive pour les êtres qui sont au ciel : et c’est la condition même de la beauté passagère des créatures d’un ordre inférieur, qui se succèdent en allant tour-à-tour de la naissance à la mort, phénomène journalier ici-bas. Le soir ne serait-il que la limite où s’arrête la perfection pour chaque être, le matin, la limite où elle commence ? Car, tout être créé est renfermé entre un commencement et une fin. Voilà, dis-je, un problème difficile à résoudre. Quoi qu’il en soit de ces deux explications, qui n’en excluent pas une troisième, peut-être meilleure, comme nous pourrons le voir plus tard, nous allons examiner la perfection du nombre 6 d’après les propriétés des nombres qui nous permettent de compter les objets matériels et de leur donner une disposition harmonieuse. Cette question n’est point étrangère à notre sujet.

CHAPITRE II. QUE LE NOMBRE 6 EST UN NOMBRE PARFAIT.


2. Le nombre 6 est le premier nombre parfait, en ce qu’il est égal à la somme de ses parties aliquotes : il y a en effet d’autre nombres parfaits, mais à d’autres titres. Le nombre 6 est donc parfait en ce qu’il est égal à la somme de ses parties aliquotes, telles, en d’autres termes, que leur produit soit égal au nombre qu’elles composent. Cette partie aliquote peut toujours être exprimée par une fraction : ainsi le nombre 3 est une fraction glu nombre 6 dont il forme la moitié, et de tous les nombres supérieurs à 3. Par exemple, il forme la patrie la plus considérable des nombres 4, 5, puisque 4 se décompose en 3 et 1, 5 en 3 et 2. Quant aux nombres 7, 8, 9 etc, 3 y entre pour la plus petite part. En effet, 7 se décompose en