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cevaient une rotule, et en concluaient que ces femmes avaient peu de vergogne et de mauvaises mœurs. Nous pensons qu’on ne doit pas observer les usages d’un peuple primitif avec des yeux de Parisien, et nous avouons naïvement n’avoir pas plus ressenti d’horreur que si nous eussions vu les personnages du Poussin marcher devant nous.

De nombreux troupeaux paissent aux approches des villages. Ici c’est un haras ; là ce sont de grands bœufs blancs aux longues cornes ; ailleurs des buffles qui sommeillent dans la vase. Les buffles, qui y sont fort nombreux, donnent beaucoup de caractère au pays. On les attelle ordinairement à de petites voitures basses, dont les côtés figurent une échelle, et où n’entrent ni un clou ni une parcelle de fer. Ainsi construits, ces véhicules ont des propriétés digestives fort énergiques, car ils vous secouent horriblement en passant sur les ornières. En revanche ils peuvent s’allonger, se rétrécir, se plier, suivant le besoin du moment, avec une souplesse dont je ne me suis jamais rendu compte. Attelés par la tête, ces buffles sont conduits par un Valaque aux cheveux longs, qui leur adresse constamment la parole. Coiffé d’un bonnet de poils noirs, et vêtu d’une guba noire, il semble emprunter lui-même quelque chose à ses buffles. Ils ont tous les trois la même démarche lente et paresseuse, et lèvent la tête du même air de curiosité pour vous voir passer.