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Hongrie décidèrent la victoire. Kinisi, éperonnant son cheval, s’était lancé dans la mêlée, un sabre à chaque main. Il parcourut le champ de bataille, fauchant, pour ainsi dire, la foule des Ottomans. À la fin, après avoir perdu quarante mille des leurs, les Infidèles furent contraints de prendre la fuite. On les poursuivit long-temps, et les paysans, s’armant à la hâte, égorgèrent ceux qui avaient échappé aux soldats. Les vainqueurs délivrèrent des milliers de captifs que les Turcs avaient chargés de chaînes. C’était toujours ainsi que se terminaient ces grandes journées. Combien se cherchaient, se retrouvaient, qui se croyaient à jamais séparés ! Les Hongrois regagnèrent le champ de bataille, et se reposèrent, dit une chronique, super hostium cadavera.

Un trait montre combien les mœurs asiatiques avaient encore de force en Hongrie à cette époque. Les vainqueurs exécutèrent au milieu des morts des danses guerrières, et firent un repas copieux. On a cru voir dans ce fait les transports d’une joie immodérée, et, grâce aux exagérations des historiens, on l’a mal expliqué. Pour le comprendre, il faut savoir qu’aujourd’hui encore, en Hongrie, comme autrefois chez beaucoup de peuples de l’Europe, il ne se fait pas de funérailles importantes sans festin. Il faut surtout connaître la danse hongroise. Cette danse caractéristique, exécutée par des hommes seuls rangés en cercle, et faisant sonner l’éperon au son d’une musique tour à tour brillante et