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semblent plus légères quand on se trouve deux pour les supporter. « Je suis accompagné, dis-je résolument, d’une personne qui ne me quitte pas. — Où est-elle ? demanda l’évêque. — In curru, répliquai-je (j’ai dit que nous parlions latin), « dans le char », regrettant d’appliquer ce mot poétique à l’abominable carriole qui nous avait cahotés jusque là. J’attendais l’effet de ce mot décisif ; mais à ma grande surprise mon interlocuteur resta impassible. Il ne paraissait ni charmé ni embarrassé ; évidemment il n’avait pas entendu. Je pensai que les Hongrois, qui font plier à tous leurs besoins la langue de Cicéron, avaient pu imaginer une expression nouvelle pour signifier « voiture », comme ils ont inventé le mot sclopetum pour dire « fusil ». Aussi, afin de convaincre l’évêque que je ne lui adressais pas une métaphore dans le goût de celle que fait Horace dans sa fameuse ode à Mécène, je m’approchai de la fenêtre en indiquant la rue du doigt. Cela faisant, je répétai mon mot classique, dont je ne voulais pas démordre. L’évêque, que cette pantomime avait préparé à l’attention, m’entendit cette fois, et deux minutes après notre cocher valaque, qui ne se doutait pas qu’il avait joué le rôle d’Automédon, amenait son currus dans la cour, de l’air d’un conquérant qui rentre dans ses foyers.

Nous n’eûmes qu’à nous louer de l’hospitalité de Balásfalva. Dès le lendemain je visitai le collége, conduit par le professeur de philosophie, M. Joseph Papp,