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la fumée de ma pipe solitaire, ce petit coin du paradis… de Mahomet, où j’ai passé une heure !

Navarette.

Espérons que vous y reviendrez.

André.

Dans combien de temps ?… Il va falloir encore trimer quatre ou cinq ans…

Navarette.

Qu’est cela à votre âge ?

André.

Vous en parlez à votre aise ! Je ne me suis jamais amusé, moi. Les femmes que j’ai rencontrées n’étaient pas dignes de délacer les brodequins de Valentine.

Navarette.

Comme vous vous montez la tête !

André.

C’est vrai ! je ne sais ce que j’éprouve, mais il me semble que je n’ai pas vécu jusqu’à présent. Je sens en moi une explosion de sensualités inconnues. J’aspire les senteurs voluptueuses, comme un cheval de bataille l’odeur de la poudre !… Et dire qu’il faut reprendre le collier de misère…

Navarette.

Qui vous y force ? Restez !

André.

Le puis-je ? ma fortune est là-bas !

Navarette.

Combien vous rapportera l’exécution de ce canal ?