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derait pas, sans doute, à venir dire sa peine.

La paysanne partie, Madame l’Infirme ouvrit toute grande sa porte. Elle allait et venait, marchant comme elle n’avait jamais marché jusqu’alors, sa canne martelant le carrelage de la maison et heurtant même les sièges au passage.

Elle s’arrêta, le front levé vers les portraits de ses parents, qui tenaient au mur la plus belle place, et, sans un mot, elle resta longtemps à les regarder.

La servante, qui n’avait jamais donné raison aux disparus, les blâma de nouveau :

— Ils n’auraient pas dû être si sévères.

Et Madame l’Infirme, qui venait d’accorder à ses parents le pardon qu’elle n’avait pu obtenir d’eux pour elle-même, reprit sa marche en disant avec un profond regret :

— Que n’ont-ils eu un cœur plein d’amour au lieu de tant de sévérité, ils vivraient encore, sans doute, et mon petit garçon les aimerait tant…

Lasse enfin, elle se tint debout sur le seuil, portant ses regards en tous sens à la recherche du rôdeur.