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surer en mettant la faute sur l’air vif du large succédant à l’air vicié de Paris ; mais malgré cela elle cherche des signes de dérangement cérébral chez ses parents. Son père, le doux Marc, qui a préféré mourir plutôt que d’être séparé de sa femme ; le grand-père, qui par amour pour son fils n’a vécu que de haine pendant de si longues années ; elle-même, avec ses yeux trop grands, et ses cheveux rebelles, dont les épais bandeaux se soulèvent et s’écartent de ses tempes, ce qui lui donne, au dire de Jacques Hermont, l’air d’un oiseau peureux cherchant toujours à s’envoler sans jamais y parvenir ; ses cheveux au parfum mystérieux et indéfinissable dès que l’eau vient à les toucher. Oui, certainement, les Lumière étaient marqués de folie, comme les Barray étaient marqués d’avarice ; ceux-là, qui ne vivaient que pour la terre, semblaient en porter tout le poids sur leur tête, ce qui rapetissait leur front et y creusait des lignes verticales et profondes, toutes pareilles à celles qui se creusaient au front de leurs bœufs.

Attristée soudain, Églantine va et s’égare dans la lande où les petits arbres courbés s’en vont seuls, comme des maudits.