Page:Audoux - Douce Lumiere.djvu/138

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le jour s’en est allé, le feu s’est éteint, la souche n’est plus qu’un petit tas de cendres fines et blanches que des vents coulis soulèvent et emportent vers le haut de la cheminée. Églantine, avec une lenteur qui ne lui est pas coutumière, se redresse. Elle repousse les lourds chenets de fer et s’étend sur la plaque du foyer restée chaude. Et là, le visage tourné vers son chien, le cœur fermé au regret comme à l’espoir, le corps brisé et la pensée inerte, elle replie un coude sous sa tête et s’endort enfin.

Au jour elle est debout, avec un visage rigide où se marque, au front lisse, un pli qui rapproche les fins sourcils. Elle a, de plus, un regard tourné en dedans, que rien ne détourne, pas même le museau de Tou tendu comme pour quêter une dernière caresse.

Ce qu’elle voit, c’est sa douleur, une douleur qui ne l’a pas quittée un instant, même pendant son sommeil. Cette douleur, elle le sait, la suivra partout et ne finira qu’avec sa propre vie. Elle ose la regarder en face, ainsi qu’elle a regardé la mort du milieu de l’étang. Oh ! comme la mort était