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Ma mère fut aussi vite qu’eux auprès de moi.

— C’était donc toi ? me dit-elle.

Mon père et les jumeaux s’approchèrent rapidement aussi. Et pendant quelques instants, il y eut entre nous autant de pleurs que de rires.

Firmin qui n’avait pas grandi et se haussait pour m’embrasser s’excusa ainsi de ne pas m’avoir reconnue du premier coup :

— D’abord, il fait très noir sous ton arbre. Et puis tu es presque aussi grande que lui.

Tous s’étonnèrent de me voir si grande, car maintenant je dépassais ma mère dont la taille était cependant élevée.

Comme Firmin et Angèle m’entraînaient sur la route, mes parents s’arrêtèrent pour me regarder marcher. J’eus pitié de leur visage consterné, et, l’air enjoué, je répétais ce qu’avait dit oncle meunier :

— Cela se voit parce que je suis trop grande, si j’étais petite cela ne se verrait pas du tout.

La journée passa, rapide ; mes parents devaient repartir le soir même, ne pouvant disaient-ils perdre une seule journée de travail. Tous deux avaient un air soucieux et sévère. Ils restaient à mes côtés de préférence, et s’ils avaient à se parler, ils le faisaient sans se regarder.

Ils mirent au lit les jumeaux, las de grand air et de jeux, et après nous avoir tous embrassés très tendrement, ils reprirent le chemin de la gare accompagnés seulement d’oncle meunier.

Après leur départ, je cessai bientôt d’écouter ce que me disaient Angèle et Firmin. Je suivais par la pensée nos parents remontant la route. Ils re-