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comme un dangereux précédent, s’opposant aux variations du tarif des douanes régulateur de notre commerce avec l’étranger.

Prétendrait-on qu’une indemnité d’expropriation forcée en cette matière, quoique restreinte au seul travail français, serait trop insolite et même trop exorbitante pour ne pas menacer l’avenir de notre fortune financière et industrielle, tandis que l’on montrerait, au contraire, un entêtement presque barbare à sacrifier toujours à des scrupules irréfléchis et exagérés la vérité, la justice et le bien public, cette loi suprême de toutes les théories ? Quel est en effet l’homme d’Etat, véritablement digne de sa haute mission, qui, certain de n’immoler aucun intérêt national, pourrait hésiter à ouvrir la source d’un nouveau revenu, pour y puiser, au moment du déficit du budget et du progrès des navigations rivales, l’abondance du Trésor, la grandeur maritime et la prospérité du commerce de la France ? Un sacrifice aussi désastreux de nos plus belles espérances de fortune et de gloire trouverait-il jamais une compensation suffisante dans la satisfaction doctrinale de ne pas transiger avec certains principes d’économie politique si profondément méconnus par l’exorbitante protection du sucre indigène et par l’interdiction du raffinage aux colonies ?

Telles étaient les questions que je soumettais, dès l’année 1837, à l’opinion publique, et que l’administration a vainement essayé de résoudre, en 1843, par la transaction que je persistais à croire la plus éclairée, la plus équitable et la plus utile à tous les intérêts en souffrance. Je félicitais alors le ministère d’avoir obéi, dans cette conjoncture difficile, à la raison d’État, à une appréciation