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du feu, il vit, avec une joie indescriptible, qu’une partie de ses drogues avait fondu. Enfin, une lueur paraissait dans ses longues ténèbres : c’était l’aube précédant le jour ; c’était le phare, dans la nuit, annonçant le port, ou bien cette branche de lierre garnie de feuilles vertes, flottant sur l’Océan, qui signala enfin à Christophe Colomb l’approche du nouveau monde !

Maître Bernard avait obtenu un résultat, faible, il est vrai, mais encourageant. Son rêve n’était donc plus une illusion ! Il poursuit ses essais avec une ardeur plus vive et un espoir plus assuré. Pendant deux ans il ne fait qu’aller, et venir de Saintes à la verrerie, y transportant des vases, et en revenant chaque fois un peu moins content ! deux ans de travaux sans relâche ! deux ans ajoutés à tant d’autres ! C’était plus qu’il n’en fallait pour éteindre la plus robuste foi en soi-même. Aussi après deux nouvelles années, il s’arrête effrayé, découragé, n’en pouvant plus. Dieu semble pourtant le regarder d’un œil plus doux. Il va tenter un dernier coup et puis renoncer à des tentatives dont l’inutilité lui sera désormais démontrée.

Il se rend à la verrerie ; il a avec lui un homme chargé de plus de trois cents sortes d’épreuves. Au bout de quatre heures de fourneau, une des épreuves fond, blanche, polie, admirable. Quelle joie pour l’ouvrier ! En voyant ce tesson sortir du four couvert du vernis cherché, il ne se sent pas d’allégresse. Il nous le dit lui-même : « Ie pensois estre deuenu nouvelle créature. »

Dès lors le voile impénétrable que la nature met-