Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/477

Cette page n’a pas encore été corrigée

arrache des larmes. Tours heureux et poétiques, images vives, la netteté scientifique sous des comparaisons pittoresques, un certain laisser aller, telles sont les qualités qui distinguent la langue de Palissy. Il peut être considéré comme un des créateurs de notre français, et il ne faut pas hésiter à le placer au premier rang des prosateurs du seizième siècle, tout à côté de Montaigne, dAgrippa d’Aubigné et de Rabelais.

Il est assurément le premier à cette époque qui ait porté sur la nature une main hardie pour en sonder les entrailles. À la Renaissance on se mit à étudier les sciences physiques, mais dans les livres. Aristote et Pline furent encore les grands naturalistes ; seulement on les tut davantage. Ulysse Aldrovande, de Padoue, ajouta à son savoir acquis dans les livres celui qu’il acquit dans ses voyages, et écrivit en latin. « La France, dit fort bien M. Villemain (Cours de littérature française au dix-huitième siècle, t. II, p. 189), la France eut dès lors la gloire de produire des observateurs de la nature, qui voyaient et pensaient par eux-mêmes, tels que Belon, le savant voyageur, un des écrivains les plus expressifs de notre vieille langue descriptive, et Bernard de Palissy, ce pauvre potier, sans éducation et sans lettres, qui, par ses essais opiniâtres, parvint à fabriquer le plus bel émail, conçut les premières théories sur l’état antérieur du globe et écrivit avec génie l’histoire de ses souffrances et de ses découvertes. »

Palissy est ennemi acharné de la théorie et de la routine. Devançant d’un siècle Bacon et Descartes, il