Page:Audiat - Bernard Palissy : étude sur sa vie et ses travaux.djvu/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Près de là, à Mortagne-sur-Gironde, la Réforme levait aussi la tête. Geoffroy d’Angliers, qui favorisait Claude de la Boissière à Saintes, avait envoyé à Mortagne un ministre de Montrichard, réfugié à Saintes, Jean de Chasteigner. Le pasteur prêcha la première fois au château, le 2 août 1562. Il fut bientôt inquiété par les papistes de Talmont. Mais un des protecteurs de Palissy, le comte de Burie, par égard pour l’épouse du seigneur de Saint-Seurin, Susanne d’Aubeterre, sa petite-nièce, fit cesser les courses des catholiques. La peur cependant prit Jean de Chasteigner, maître Jean Frèrejean et autres, à la nouvelle que Montluc avait battu Duras, et que le duc de Montpensier marchait contre les réformés de Pons. Ils se mettent en route pour l’Angleterre, fuyant leur ingrate patrie. Arrivés à Marennes, ils se prennent à méditer, et, de réflexions en réflexions, s’en retournent à Mortagne. Le voyage avait duré quinze jours. Quand l’édit d’Amboise, du 19 mars 1563, permit aux seigneurs le libre exercice du culte nouveau dans l’étendue de leur juridiction, Gabriel de la Mothe-Fouquet fixa Chasteigner à Saint-Seurin. Le ministre stipula une certaine somme pour son traitement, et qu’on irait lui chercher sa femme à Montrichard. Frèrejean, diacre et notaire royal, se dévoua avec zèle. Il partit avec Léon Martinaux, et, à travers la Touraine, le Poitou, la Saintonge, il ramena « heureusement » l’épouse à son pasteur, le 3 mai. La Mothe logea le ministre et sa femme au château. Ainsi les assemblées, jadis secrètes, avaient lieu en plein jour, et jusque dans les édifices du culte catholique.