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« On demeure accablé de son impuissance, on se sent le cœur défaillir, et ce serait à blasphémer Dieu, si l’on n’avait conscience que le mal est moins dans la nature que dans le vice des institutions humaines. »

Il n’a donc pas suffit à l’Angleterre d’être la première puissance maritime du monde, le fournisseur universel des cotonnades, des coutelleries et des casimirs, pour rendre son peuple heureux. Sa grandeur a été l’instrument de la misère de son peuple. Me dira-t-on que ce sacrifice était nécessaire à sa puissance ? Amère dérision. L’Angleterre pouvait être d’autant plus forte, riche et glorieuse, qu’elle aurait été plus humaine, plus juste, plus charitable pour la masse de ses enfants. Elle a souffert et toléré pendant des siècles, jusqu’à ce jour, l’exploitation effrénée du travail par le capital. Aujourd’hui elle est sur un volcan. Elle n’est pas seule en danger. La France, la Prusse, l’Espagne, l’Italie ont au front de leurs capitaux la marque du fratricide. Tous ils ont participé au martyrologe du travailleur dans un état de société chrétienne de nom plutôt que de fait.

Leur industrie manufacturière a été l’instrument de la misère, de la dégradation et de l’esclavage social et politique du peuple, au lieu d’être celui de sa prospérité, de son bonheur et de sa moralité. Chez tous le capital a exploité l’ouvrier plutôt que le charbon, le coton et le ver à soie. Le tableau des maux de l’industrie européenne a arraché de tous temps aux hommes justes, aux comités d’enquête, à tous les philantropes, les plaintes les plus amères et les protêts les plus énergiques et les plus éloquents fondés sur les preuves les plus irrécusables. Famine, émigration, riots, soulèvements, épidémies d’ignorance ou pestilentielles, tout a été sans résultats. Et pourtant