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XII
histoire


de la nobleſſe littéraire acquis au Sonnet : la vogue & le commentaire. N’oublions pas de conſigner, pour compléter la litanie, le recueil de ſoixante & onze Sonnets politiques de Pierre Le Loyer.

Mais ce n’était là que le prélude de la gloire du Sonnet. Il n’avait paſſionné que les poètes. Voici venir le temps où la paſſion devait gagner le public, & quel public !

Vers 1599, Honorat Laugier, ſieur de Porchères, qui fut plus tard de l’Académie, compoſa ſur les yeux de la ducheſſe de Beaufort, maîtreſſe de Henri IV, un Sonnet dont la vogue durait encore vingt ans après, & qui ſe trouve imprimé dans tous les recueils de poésies galantes de l’époque. « Sa réputation, dit Colletet, s’épandit tellement par la France, qu’il en fit naiſtre vne infinité d’autres à ſon imitation. »


Je le cite comme un monument du goût qui régnait alors :


Ce ne ſont pas des yeux, ce ſont plustoſt des dieux,
Ils ont deſſus les Rois, la puiſſance abſoluë :
Dieux, non, ce ſont des cieux, ils ont la couleur bluë
Et le mouuement prompt comme celuy des deux :

Cieux, non, mais deux Soleils clairement radieux,
Dont les rayons brillans nous offuſquent la veuë :
Soleils, non, mais eſclairs de puiſſance incognuë,
Des foudres de l’Amour ſignes preſagieux.