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des sonnets


Jalouſie




Ah ! toi, l’indifférent, tu ſouffres à ton tour :
L’angoiſſe t’a mordu, les peines ſont venues,
Tu trembles & tu crains en attendant le jour,
Et la nuit te remplit de terreurs inconnues ;

J’ai vu luire en tes yeux, par un bruſque retour,
Des larmes, juſque-là vainement retenues ;
Et toi, qui ris de tout, toi, qui ris de l’amour,
Pour fonder l’avenir tu regardes les nues.

Tout n’eſt donc pas menſonge en nos maux ici-bas,
Que tu ſubis auſſi, toi, dont le cœur la nie,
De la loi de douleur la ſanglante ironie ?

Et tu peux donc aimer, toi, qui ne m’aimes pas ?
Mais quel déchirement qu’une telle penſée,
Dans ma bleſſure encor quelle épine enfoncée !


Louiſa Siefert.