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pourquoi on aime la france

propre des vaillantes petites femmes qui ont remplacé dans l’organisme économique les hommes partis pour la tranchée, on se sent pris d’une admiration attendrie pour un peuple qui sait allier, jusque dans ses classes les moins favorisées, tant de grâce à tant de vertus. Vos malheurs vous auront au moins forcés à vous montrer sous votre jour véritable. Ne souriez pas : le Métro parisien est à l’heure actuelle un des foyers de rayonnement des plus belles qualités françaises…

Nationalistes pour la plupart, les jeunes Canadiens-Français des classes plaisamment appelées supérieures se sont enrôlés en très petit nombre. Quelques-uns m’avaient précédé, plusieurs m’ont suivi. Mais depuis plusieurs années j’étais pour employer le vocabulaire à la mode — un nationaliste minoritaire, et j’eus beau répondre, à la jeunesse qui m’objectait nos propres misères, que les plus beaux sacrifices sont ceux que l’on se fait entre malheureux, je vis accourir peu de fils de famille sous mes étendards. Nos troupes se sont donc recrutées presque exclusivement dans le peuple. Or, nous avons assisté en France à un spectacle à la fois imprévu et réconfortant. Français d’Amérique et Français de France, qu’on croyait devenus étrangers l’un à l’autre, et que, la veille encore, séparaient profondément leurs dissentiments religieux, se sont mis tout de suite à fraterniser.

Il est bien parfois arrivé que les tommies canadiens-français abusassent légèrement du crédit que leur faisaient leurs cousins d’outre-mer. Mais nos gars sont avenants, ils ont la langue bien pendue, le cœur chaud et bon, et sur la main : il n’en faut pas davantage pour gagner le cœur du Français. Partout où ils ont passé, ils ont laissé des amis. Mais en retour ils subissent le charme de votre douceur, de votre humanité. Ils admirent votre industrie, votre persévérance, vos solides vertus domestiques[1]. Ils disent souvent, en parlant

  1. Tant qu’il sera vrai que l’autorité paternelle est le fondement de la famille et que la famille est le fondement de la société, la