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MALHERBE

tant, à cette lamentable époque, les sincères croyances religieuses étaient rares. Le jeune homme part donc, à vingt et un ans, pour Aix, à la suite d’un prince du sang, Henri d’Angoulême, grand prieur de France, amiral des mers du Levant et gouverneur de Provence, à qui il sert de premier secrétaire, mais un secrétaire qui a la main quelquefois à la plume, souvent au pommeau de l’épée.

Bientôt « il s’insinue aux bonnes grâces » d’une jeune veuve, Madeleine de Coriolis, qui avait perdu ses deux premiers maris et qu’il épouse en troisième : elle était fille d’un président au Parlement de Provence, qui, lui, avait convolé quatre fois. L’hymen faisait rage en cette famille.

Après dix ans de séjour dans le Midi, en 1586, Malherbe revient à Caen, où il apprend la mort de son protecteur provençal, tué dans un duel tragique, et le ménage vivote péniblement en Normandie, « sans aucun secours de sa maison », écrit le poète avec mélancolie, « que peut-être un tonneau de cidre ». Les honneurs de l’échevinage ne peuvent compenser pour lui les difficultés des relations de famille, et il se décide en 1596 à retourner avec sa femme dans ce cercle de relations et d’amis qu’il a laissés à Aix, et où il retrouve vraiment une seconde patrie.

La magistrature en est le centre, comme il arrivait alors dans les villes parlementaires. À la tête des réunions d’esprit apparaît le premier président du Parlement d’Aix, Guillaume du Vair,