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tant que nous sommes, noblesse, peuple ou bourgeois, et qui nous arrache au château ou au sillon de nos pères, pour nous précipiter dans les villes, vers la vie ardente du cœur ou de l’esprit, de l’ambition ou des sens. Il en est qui reviennent un jour à la terre, mais comme Racan, blessés, mutilés, résignés, au lieu d’avoir consacré généreusement et sagement au sol leur jeunesse, leur santé et leur première ardeur, en sorte que la pauvre terre est devenue surtout le refuge des malades, des enfants, des vieillards, des vaincus de la vie, des ruinés, des retraités de tout genre et des sots. Certes elle est assez hospitalière pour accueillir tous ceux-là, mais elle mérite mieux ; elle voudrait encore, ce qu’elle trouve si rarement, de la virilité, de la force intacte, de l’intelligence, de la jeunesse, — toute prête à donner en échange ces biens inestimables qui se nomment la santé, la paix qui est la santé de l’âme, l’honnêteté, l’équilibre heureux des facultés.

Nous voudrions qu’aujourd’hui plus que jamais il se fît une conspiration de toutes les bonnes volontés autour de cet admirable poème, pour le remettre en belle place et le faire sentir à nouveau, pour ramener l’attention de chacun au jeune gentilhomme d’autrefois qui, ne trouvant pas le bonheur dans tout ce qui le lui avait brillamment promis, revient, à l’âge de trente ans, vers la terre qu’il a quittée enfant, cette éternelle méprisée dans les bras de qui il vient