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ajoute cette phrase étonnante : « Et n’allez pas vous imaginer, de grâce, que nous souhaitassions que vous ne la vissiez point y et que vous rompissiez avec elle en notre faveur. »

Les explications envoyées par le pauvre Racan ne purent rien. Sa double amitié avec Conrart et avec Chapelain sombra dans cette sotte aventure. N’est-ce point la comédie humaine que nous voyons encore se jouer chaque jour sous nos yeux : le collègue ou l’ami se brouillant avec vous parce que vous n’êtes pas venu le voir, l’électeur votant contre le candidat qui l’a négligé, éternelle et lamentable comédie à laquelle on peut donner pour titre : L’Omission d’une visite ?

C’est une dizaine d’années auparavant, dans la lune de miel de cette amitié, vers 1650 ou 1651, que Conrart eut l’idée d’inscrire ce qu’il savait par lui-même de la vie de son ami Racan : le poète avait passé la soixantaine et était d’une santé débile ; il était donc naturel et prudent au secrétaire de l’Académie de prendre quelques notes sur son confrère. Or il se trouve que nul document ne contient sur cette existence plus de renseignements sûrs et précis que la courte Notice rédigée à la hâte par Conrart. Aussi l’avons-nous eue perpétuellement sous les yeux en écrivant la vie de notre héros.

La première phrase en est celle-ci : « M. de Racan est né en une Maison nommée Champmarin, qui est moitié dans le Maine et l’autre moitié dans l’Anjou », et Conrart ajoute grave-