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Qu’en tes prospérités à bon droit on soupire,
et qu’il est malaisé de vivre en ton empire
sans désirer la mort !

Notre poète s’était durement moqué des Psaumes de Desportes ; il fit néanmoins lui-même des Psaumes, sans doute pour se conformer à l’usage courant et montrer là aussi son savoir-faire. Mais en homme avisé il se garda bien de traduire les cent cinquante : il en fit 3, préférant toujours la qualité à la quantité, s’appliquant à rivaliser avec l’énergie biblique, au lieu de la noyer, comme l’on faisait, dans le délayage, et arrivant ainsi à concentrer sa pensée de plus en plus fortement.

Le premier psaume traduit par lui, le 8e de David, ne contient guère qu’un beau vers…, tout comme la tragédie de des Millets dans Le Monde où l’on s’ennuie. Sur la perversité des inclinations de l’homme, Malherbe s’écrie avec un réalisme énergique, qui annonce Pascal :


Et nos sens corrompus n’ont goût qu’à des ordures.

Le psaume 128, que le poète met dans la bouche du jeune Louis XIII aux prises avec la révolte de 1614, présente un bel ensemble dans ses cinq strophes : l’on a raison de souvent citer celle-ci, qui condense deux versets de David :


La gloire des méchants est pareille à cette herbe
qui, sans porter jamais ni javelle ni gerbe,
croît sur le toit pourri d’une vieille maison :
on la voit sèche et morte aussitôt qu’elle est née ;
et vivre une journée
est réputé pour elle une longue saison.