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aujourd’hui du lin et du coton. On écrivait tout autant à Rome que nous pouvons nous-mêmes écrire, pour les mêmes besoins sociaux, avec la même facilité, avec la même ardeur, et aussi avec les mêmes passions et la même vanité. La matière était autre ; l’objet était le même. La grande différence, c’est l’imprimerie, qui ne devait être découverte que quinze ou seize siècles plus tard. Les copies des livres, des actes administratifs, des lettres, étaient coûteuses et lentes ; par suite, peu nombreuses et fort exposées à se perdre. La presse est venue rendre la publication, la transmission, la conservation, mille fois plus sûres, mille fois plus rapides, mille fois moins chères. A la main des copistes, on a substitué l’infaillible précision d’une machine, sa puissance sans borne, et son bon marché. Mais ce n’est là, quoi qu’on en puisse dire, qu’une transformation toute matérielle. L’essentiel était trouvé dans les temps les plus reculés. Le grand et véritable inventeur était encore le vieux Teuth, ou tel autre magicien d’Égypte, qui avait fait parler le papyrus et les caractères qu’y traçait le roseau du scribe, trempé dans la couleur. Malgré ce qu’en pensait le prudent Thamus, le discours écrit dans la pensée et dans l’intelligence ne suffisait qu’à celui qui le portait dans son âme, solitaire et presque muet. Le discours vivait par l’écriture, et pouvait se