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des péripéties, des reconnaissances (des mœurs)[1] et des événements pathétiques ; elle exige aussi la beauté des pensées et du beau style. Tous ces éléments, Homère les a mis en usage et pour la première fois, et dans les conditions convenables.

II. En effet, chacun de ces deux poèmes constitue, l’Iliade une œuvre simple et pathétique, l’Odyssée une œuvre complexe — les reconnaissances s’y rencontrent partout, — et morale. De plus, par le style et par la pensée, il a surpassé tous les poètes.

III. Ce qui fait différer l’épopée (de la tragédie), c’est l’étendue de la composition et le mètre. La limite convenable de son étendue, nous l’avons indiquée : il faut que l’on puisse embrasser dans son ensemble le commencement et la fin ; et c’est ce qui pourrait avoir lieu si les compositions étaient moins considérables que les anciennes et en rapport avec le nombre des tragédies données dans une représentation.

IV. L’épopée a, pour développer son étendue, des ressources variées qui lui sont propres, attendu que, dans la tragédie, l’on ne peut représenter plusieurs actions dans le même moment, mais une seule partie à la fois est figurée sur la scène et par les acteurs ; tandis que dans l’épopée, comme c’est un récit, on peut traiter en même temps plusieurs événements au moment où ils s’accomplissent. Quand ils sont bien dans le sujet, ils ajoutent de l’ampleur au poème ; ils contribuent ainsi à lui donner de la magnificence, à transporter l’auditeur d’un lieu dans un autre et à jeter de la variété dans les épisodes ; car l’uniformité, qui a bientôt engendré le dégoût, fait tomber les tragédies.

V. Le mètre héroïque est celui dont l’expérience a fait reconnaître la convenance pour l’épopée Si l’on

  1. Addition de Susemihl.