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CHAPITRE XVI


Des quatre formes de la reconnaissance.


I. En quoi consiste la reconnaissance, on l’a dit plus haut. Quant aux formes de la reconnaissance, la première et celle qui emprunte le moins à l’art et qu’on emploie le plus souvent, faute de mieux, c’est la reconnaissance amenée par des signes.

II. Parmi les signes, les uns sont naturels, comme la lance que portent (sur le corps) les hommes nés de la terre[1], ou les étoiles que fait figurer Carcinus dans Thyeste. Les autres sont acquis et, parmi ces derniers, les uns sont appliqués sur le corps, comme, par exemple, les cicatrices ; d’autres sont distincts du corps, ainsi les colliers, ou encore, comme dans Tyro[2], une petite barque[3].

III. On peut faire un usage plus ou moins approprié de ces signes. Ainsi Ulysse, par le moyen de sa cicatrice, est reconnu d’une façon par sa nourrice, et d’une autre par les porchers.

IV. En effet, les reconnaissances obtenues à titre de preuve et toutes celles de cet ordre sont moins du ressort de l’art ; mais celles qui naissent d’une péripétie[4], comme la reconnaissance qui a lieu dans la scène du bain[5], sont préférables.

  1. Les Thébains. (Cp. Dion Chrysostome, IV.)
  2. Pièce perdue de Sophocle.
  3. C’est la barque ou le petit bateau dans lequel les deux enfants de Tyro avaient été exposés par leur mère. (Voyez Odyssée, XI, 235 ; Apollodore, Bibliothèque, t. Ier, ch. IX, § 8 ; les Fragments, de Sophocle, coll. Didot, p. 315 (Egger).
  4. Ici, la péripétie est à peu près le « coup de théâtre ».
  5. Odyssée, XIX, 386.