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entre personnages désignés pour avoir du bonheur ou du malheur.

IV. La plus belle reconnaissance, c’est lorsque les péripéties se produisent simultanément, ce qui arrive dans Œdipe[1].

V. Il y a encore d’autres sortes de reconnaissance. Ainsi, telle circonstance peut survenir, comme on l’a dit, par rapport à des objets inanimés ou à des faits accidentels ; et il peut y avoir reconnaissance selon que tel personnage a ou n’a pas agi ; mais celle qui se rattache principalement à la fable, ou celle qui a trait surtout à l’action, c’est la reconnaissance dont nous avons parlé.

VI. En effet, c’est cette sorte de reconnaissance et de péripétie qui excitera la pitié ou la terreur, sentiments inhérents aux actions dont l’imitation constitue la tragédie.

VII. De plus, le fait d’être malheureux ou heureux se produira sur des données de cette nature.

VIII. Maintenant, comme la reconnaissance est celle de certains personnages, il y en a une qui consiste en ce que l’un des deux seulement est reconnu, lorsque l’autre sait qui il est ; d’autres fois, la reconnaissance est nécessairement réciproque. Par exemple, Iphigénie est reconnue d’Oreste, par suite de l’envoi de la lettre[2] ; mais, pour que celui-ci le soit d’Iphigénie, il aura fallu encore une autre reconnaissance[3].

IX. Il y a donc, à cet égard, deux parties dans la fable : la péripétie et la reconnaissance. Une troisième partie, c’est l’événement pathétique[4].

  1. Toujours Œdipe roi. Aristote ne cite pas Œdipe à Colone.
  2. Iphigénie en Tauride (vers 759 et suiv.).
  3. Iphigénie en Tauride (vers 811 et suiv.).
  4. M. Egger traduit πάθος, l’événement tragique.