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place convenable ; et même on l’appelle aujourd’hui l’ïambe parce que c’est dans ce mètre que l’on s’ïambisait mutuellement (que l’on échangeait des injures).

IX. Parmi les anciens, il y eut des poètes héroïques et des poètes ïambiques. Et, de même qu’Homère était principalement le poète des choses sérieuses (car il est unique non seulement comme ayant fait bien, mais aussi comme ayant produit des imitations propres au drame), de même il fut le premier à faire voir les formes de la comédie, en dramatisant non seulement le blâme, mais encore le ridicule ; en effet, le Margitès est aux comédies ce que l’Iliade et l’Odyssée sont aux tragédies.

X. Dès l’apparition de la tragédie et de la comédie, les poètes s’attachant à l’une ou à l’autre, suivant leur caractère propre, les uns, comme auteurs comiques remplacèrent les poètes ïambiques, et les autres, comme monteurs de tragédies, remplacèrent les poètes épiques, parce qu’il y a plus de grandeur et de dignité dans cette dernière forme que dans l’autre.

XI. Pour ce qui est d’examiner si la tragédie est, ou non, dès maintenant, en pleine possession de ses formes, à la juger en elle-même ou par rapport à la scène, c’est une question traitée ailleurs[1].

XII. Ainsi donc, improvisatrice à sa naissance, la tragédie, comme la comédie, celle-ci tirant son origine des poèmes dithyrambiques, celle-là des poèmes phalliques, qui conservent, encore aujourd’hui, une existence légale dans un grand nombre de cités, progressa peu à peu, par le développement qu’elle reçut autant qu’il était en elle.

XIII. Après avoir subi de nombreuses transforma-

  1. Cp. le chapitre XXVI et dernier.