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est insaisissable et fatigant. Toutes choses sont déterminées par le nombre, et le nombre appliqué à la forme de l’élocution, c’est le rythme, duquel font partie les mètres avec leurs divisions.

III. Voilà pourquoi le langage, de la prose doit nécessairement posséder un rythme, mais non pas un mètre ; car ce serait alors de la poésie. Du reste, il ne s’agit pas d’un rythme dans toute la rigueur du mot, mais de quelque chose qui en approche.

IV. Parmi les rythmes[1], l’héroïque est majestueux et n’a pas l’harmonie propre à la prose[2]. L’ïambe se rapproche du langage ordinaire ; aussi, de tous les mètres, ce sont les ïambes que l’on forme le plus souvent en parlant. Mais il faut nécessairement (dans le discours) quelque chose de majestueux et qui transporte l’auditoire. Le trochaïque convient plutôt à la danse appelée cordace, comme le font voir les tétramètres ; car le rythme des tétramètres semble courir. Reste le[3] dont Thrasymaque a fait usage le premier. Seulement ses imitateurs ne pouvaient le définir ; or le péan est le troisième rythme et fait suite aux rythmes précités ; car il est dans le rapport de 3 à 2, et, des deux précédents, l’un est dans le rapport de 1 à 1, et l’autre dans celui de 2 à 1. Vient après ces rapports l’hémiole (sesquialtère) ; or c’est celui du péan.

V. Quant aux autres, il faut les laisser de côté pour

  1. Cp. Cicéron, De Orat., III, 47 ; Quintilien, De Inst. orat., IX, 4.
  2. Cp. Poétique, IV, §§ 7 et 19. — Démétrius, 42.
  3. D’où l’expression παιωνικὸν γένος, genre péonique, genre de rythme sesquialtère, c’est-à-dire comportant cinq pieds disposés dans le rapport de trois à deux ou de deux à trois. (Aristoxène, Élém. rytmiques, p. 302 de Morelli.)